26 juin 2022

Pâques en juin attire le pèlerin

Participants : Alice, Daniel, Jérôme, Loris, Mathieu, Sacha et Yannick
TPST : 4h00

Alice, Yannick et son cadet, le jeune Sacha, étaient conviés par le GSV à une découverte touristique de la grotte de Pâques en ce chaud dimanche de juin. A 9h30 la fine équipe était réunie sur le petit parking de l'usine EDF de Saint-Cézaire. 

Le temps de dire du mal du père François qui une fois de plus nous fait faux bond, nous nous équipons et nous mettons en marche vers le célèbre trou dans lequel je n'ai personnellement plus remis les pieds depuis vingt ans. Il faut dire qu'à l'époque, j'étais un spéléologue franc-tireur acoquiné avec deux branquignols et que nous avions réussi à nous perdre lors de chacune des trois visites effectuées dans la cavité. Ça calme. La grotte de Pâques est en effet connue pour être labyrinthique. Le Président Dada nous rassure à ce sujet : avec lui, aucune crainte, nous ne tournerons pas indéfiniment à l'intérieur jusqu'à épuisement de notre éclairage et blanchiment de nos os. Il est vrai que le Grand Homme a un sens de l'orientation souterrain supérieur aux meilleurs GPS. Certaines mauvaises langues disent qu'il décline. Je préfère croire qu'il a conservé toutes ses capacités...

L'ami Loris, toujours féru de technologie vintage, nous a sorti pour l'occasion son acéto-qui-pue dont nous devons reconnaître qu'il dispense un éclairage magique et inégalable malgré son côté pas très écolo. Comme il galère un peu à régler sa flamme, il nous inflige un chalumeau long de vingt centimètres au sujet duquel Alice, sa charmante compagne, constate "C'est bien lui çà, longue, droite et brillante !". Le ton est donné, on ne va pas s'ennuyer. 

Nous nous introduisons vers 10h30 dans la cavité et entamons la visite par 150 mètres de reptation et de quatrepattage qui nous font vite regretter d'avoir mis une petite polaire sous la combi. Rien de bien dramatique pour nos initiés de frais, mais une progression soutenue qui sollicite tous les muscles du corps. Alors que je rampe  le nez collé au sol, je tombe sur une petite flaque laiteuse d'un diamètre approximatif de deux centimètres. Les hypothèses les plus visqueuses me traversant l'esprit, je soumets le mystère à la sagacité de Yannick qui me suivait de près. Le garçon qui est passionné de chiroptères et a fait de longues études de zoophilie trempe un doigt circonspect dans la substance et le porte à sa langue. Il est formel : "C'est de la semence de chauve-souris". Sacha qui nous a rejoint entretemps demande à son père "Papa, c'est quoi de la semence ?". Mathieu qui trainait dans le coin et qui sait y faire avec les gosses tente une explication scientifique "Et bien vois-tu la semence c'est du jus de graine de bestiole". "Oui mais ça leur sert à quoi le jus de graine aux bestioles ?" interroge notre jeune curieux. Yannick et moi préférons nous éclipser subrepticement et laisser Mathieu s'enfoncer irrémédiablement dans ses explications au petit Sacha. Clairement, nous préférons ne pas entendre la suite. Dubitatif, je questionne Yannick : "C'est vrai que c'est du sperme de chauve-souris ? Tu reconnais ça au goût ?". "Mais non banane !" rigole notre joyeux luron "c'était juste pour refiler Sacha à Mathieu. En vrai, ça avait plutôt le goût de la vinaigrette..." Alice, qui nous a entendu, percute tout de suite : "Loris ! Dans quoi tu as mis la sauce pour nos salades de patates ?". "Dans un pot de confiture pourquoi ?". "Pour rien" soupire Alice. Effectivement, l'homme au chalumeau avait soigneusement emmailloté un bocal de vinaigrette en verre et l'avait amoureusement calé dans son kit. A presque cent mètres de l'entrée, le kit fait gling gling et les giclées de vinaigrette parsèment désormais notre parcours. Il y en a deux qui vont manger de la salade non assaisonnée à midi...

Ce dossier enfin clos, nous débouchons dans la salle de Minuit au plafond joliment concrétionné. Le Président nous propose d'aller d'abord explorer la belle galerie de la Cascade avant de nous aventurer plus loin vers l'est. Compte tenu de la sècheresse générale, la calcite est à peine humide et les petits gours tristement vides. Nous grimpons allègrement jusqu'à l'ancien siphon qui, paradoxalement, est encore rempli de flotte. Daniel étant toujours allergique à l'eau, surtout quand elle rentre dans ses bottes et lui humecte le dessous des roubignolles, propose à Alice, Yannick et Loris de franchir l'obstacle aquatique en leur faisant miroiter la perspective d'une méga-galerie façon tunnel de métro. Tout le monde se débine, surtout ceux chaussés de simples godasses de marche, et nous redescendons vers la salle de Minuit. En chemin nous croisons Mathieu et Sacha, le premier expliquant au second les secrets de la reproduction au moyen de petites figurines en glaise. Yannick, le père indigne, ricane "J'imagine la tête de sa mère quand le gamin va lui raconter sa sortie spéléo..."

Mon estomac commençant à gargouiller, je demande à Dada si par hasard il ne serait pas l'heure de casser la croûte. "Ça va pas non ? Il est à peine 11h20. On va pas manger comme les poules. Allez hop ! Galerie de l'oiseau !" Au GSV on ne remet jamais en cause l'autorité du Président ni sa précision toute chronométrique. La Galerie de l'oiseau est un gros tube qui étend ses parois de roche coupante sur plus de 120 mètres. Notre érudit Leader Maximo nous explique que les premiers explorateurs y ont trouvé un squelette de volatile préhistorique, peut-être un corbeausaure égaré, ce qui a valu son nom à cet impressionnant tunnel de plusieurs mètres de diamètre. Arrivé au bout, Daniel décrète que ceux qui le veulent peuvent poursuivre vers les gours de Tony. 

Loris, tout feu tout flamme persuade Mathieu d'aller y jeter un oeil et je me fais une douce violence pour les accompagner dans ce qui s'avère être un laminoir surbaissé. Nous traversons les fameux gours de Tony sans même nous en apercevoir et arrivons dans une petite salle où il est enfin possible de s'asseoir. Mes deux clampins, très en forme, décident de pousser plus loin. J'en ai ma claque de ramper et les préviens que je les attends là. Sauf que vingt minutes plus tard, ils ne sont toujours pas de retour. Considérant qu'ils sont définitivement perdus, je reviens sur mes pas et trouve le reste de l'équipe en train de pique-niquer tranquillement "Merci de nous avoir attendus, bande d'enfoirés" je rouscaille. Le Président, impavide, me rétorque : "Estime-toi heureux qu'on n'ait pas commencé à picoler sans toi. On a pas osé sortir ta bouteille de son fourreau de protection, la fermeture éclair est cassée". La belle excuse. J'arrive quand même à extraire mon saint-nicolas-de-bourgueil et à faire le service. Seuls Sacha et Alice déclinent, le premier parce qu'il est bien élevé et la seconde parce qu'elle préfère le blanc. Loris et Mathieu finissent par réapparaître avec de la boue par-dessus le casque et nous confirment que c'est bien merdique jusqu'à la salle du lac qui n'a d'ailleurs de lac plus que le nom vu l'absence d'eau.

Le déjeuner se termine pas quelques doigts d'un excellent limoncello artisanal macéré clandestinement par le couple Alice-Loris (tiens, ça rime...), lequel tandem a aussi pensé à amener le café, ce qui, compte tenu de notre situation statique dans un environnement frais et humide, réchauffe les corps et les esprits. Yannick nous exhibe une superbe boîte de biscuits connue pour ses cigarettes. Comme le pinard, le caoua et le limoncello, elle connaîtra un sort funeste et ce sont avec les kits allégés d'autant que nous retournons vers la sortie. En repassant à côté des petites flaques éjaculatoires, le jeune Sacha entreprend à nouveau le pauvre Mathieu sur les mystères de la procréation in vitro. Ce gosse a une soif de connaissance incroyable...

Nous débouchons dans la moiteur de la vallée de la Siagne vers 14h30. Nous n'avons perdu personne, Loris n'a pas foutu le feu à la forêt avec son chalumeau à l'acétylène, Alice a mangé sa salade de patates sans vinaigrette, ce qui dénote une grande adaptabilité indispensable en spéléologie, Yannick a décidé de revoir totalement l'éducation sexuelle de son fils de douze ans, et Mathieu s'est juré de fermer sa gueule la prochaine fois qu'un gamin posera une question éducative qui ne lui était pas destinée...

Le Président a peut-être recruté trois nouveaux adhérents.

Finalement, ce fut une belle journée.


Jérôme


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