17 déc. 2017

Noël à Combrières

Participants : Audrey, Sophie, Camille, Christophe, Bernard, Daniel, François, Jérôme, Mathieu et la chienne Lily.
TPABAM (Temps Passé A Boire et A Manger) : 4h00

Le GSV est connu de longue date pour sa capacité à enchaîner les premières spéléologiques, et si ces dernières se sont faites plus rares ces dernières années (hormis les exceptionnels réseaux des Trois Mille Pattes et du Cocon), il reste leader dans la première festive et en 2017, les fêtes de fin d’année sont le prétexte d’un déjeuner à la grotte de Combrières dans le Var, plus connue sous le nom de Grotte de Mons.




Curieusement, peu de membres du groupe ont déjà visité cette cavité de 365 m de développement étagée sur 22 mètres d’amplitude, très facilement accessible et connue depuis des décennies par les habitants du coin. Qui dit grotte accessible, dit forcément vandalisme et il faut reconnaître que Combrières conserve de beaux restes malgré sa fréquentation.

Le rendez-vous est donné en ce beau dimanche bien froid à l’intersection de la route menant à l’usine hydroélectrique de la Siagne, le covoiturage étant ensuite impératif pour pouvoir garer deux voitures sur l’étroite route de Mons à proximité de la grotte. Tout le monde est au rendez-vous sauf évidemment Christophe qui nous rejoindra, avec sa petite famille, sous le porche de la baume 45 minutes plus tard.


Le président Dada nous donne d’emblée LA consigne : du fait de la présence de la petite Camille, interdiction formelle de proférer nos insanités habituelles à caractère sexuel ou scatologique. Bernard, passionné par les bêtes, demande si l’on pourra parler zoophilie. Le Président le foudroie du regard en lui rappelant la présence de la petite chienne Lily à laquelle il est interdit de toucher, sauf sur la tête entre les deux oreille. Bernard marmonne que ça va être gai…

Je pars en premier pour repérer le lieu des ripailles. A mi-chemin du fond de la cavité, des dalles tombées du plafond constitueront l’endroit idéal pour poser nos fesses et déployer les agapes. J’allume une douzaine de bougies pour donner un air de fête. En fait, les photophores confèrent à la scène un air mortuaire qui inspirera le doyen Bernard un peu plus tard. Pour compenser cet éclairage funéraire, je déploie mon sapin de Noël artificiel, portatif et éclairé. Lorsque la troupe finit par me rejoindre aux alentours de midi, elle s’extasie devant mon agencement et François en profite pour faire remarquer qu’il a aussi amené ses boules pour le sapin. Audrey, qui sait compter (elle fait des études scientifiques), constate que, vu qu’on est six garçons, ça fait au moins douze boules. Bernard, qui en a perdu une à la bataille de Dien-Bien-Phu précise qu’au total ça en fait onze. Le Président Dada grommelle que si on commence à dire des conneries pareilles alors qu’on est encore à jeun, on n’est pas sortis de l’auberge. Sophie bouche les oreilles de sa fille et nous commençons à déballer les victuailles. Il est prévu de s’empiffrer jusqu’au fromage puis, en guise de trou normand, ou plutôt vençois, d’aller visiter le reste de la grotte puis d’attaquer le dessert.


Mathieu ayant bien planifié les choses, chacun a apporté de quoi éponger mes deux bouteilles de bordeaux, le rhum frelaté et la quille de rouge de Bernard ainsi que les deux bouteilles de champagne de Mathieu. Dada exhibe un bocal d’olives niçoises maison qu’il a entièrement volées aux quatre coins du département et François tente de nous faire croire qu’il a préparé de ses grosses mains velues les délicats canapés au saumon et au jambon cru qu’il nous offre. Il finit par avouer à confesse que c’est son épouse qui les a confectionnés. Audrey, qui a des talents culinaires cachés, dégaine une tortilla de fort belle facture qui fait dire à son oncle Christophe : « C’est la seule tortilla qui ne me donne pas des gaz ». Ah, l’esprit de famille…


La petite Camille sautille dans tous les coins en demandant quand est-ce qu’on s’en va, la petite chienne Lily saute sur les genoux de ce vieux zoophile de Bernard qui a décidé de la gaver en douce et Dada saute sur le rhum-ananas arrangé par le même Bernard. Ainsi se déroule cet aimable déjeuner au son de chants de Noël issus d’un haut-parleur que j’avais opportunément amené. François aurait préféré des cantiques, mais vu le nombre de mécréants autour de la table, je lui réponds qu’il vaut mieux écouter de la musique commerciale.

C’est alors que notre vétéran se lève en titubant (on en est déjà à une bouteille de rhum et une bouteille de rouge) et décrète qu’il souhaite se faire inhumer dans la grotte de Mons. Mais avant, il veut essayer l’endroit où sera installé son gisant. Il jette ainsi son dévolu sur une dalle bien plate aux quatre coins de laquelle il dispose des cierges. Il s’allonge au milieu, impérial, les mains croisées sur la poitrine. C’est beau, c’est émouvant, on croirait qu’il est vraiment mort. Audrey, inquiète, vient vérifier son pouls (rappelons qu’elle fait des études scientifiques) et, soulagée, nous annonce qu’il dort.

 
Pour fêter çà, Dada remet une tournée et François nous donne un cours théologique sur la renaissance du Christ dont tout le monde se fiche. Du coup, Christophe propose qu’on fasse une crèche et commence à sortir son petit jésus. Mathieu se porte volontaire pour faire l’âne (le Président murmure que ça lui va bien). Sophie refuse catégoriquement de faire la Vierge, vu qu’elle a déjà Camille. Audrey veut bien faire une blanche brebis, ce qui fait ricaner tous les autres. Daniel qui a été menuisier il y a fort longtemps se verrait bien en Joseph. Bernard qui, entre-temps, s’est réveillé d’entre les morts propose de faire le bœuf. Bref, c’est pas gagné…



Comme convenu, après avoir dégusté un Saint-Nectaire issu des pâturages de Bernard (nous ignorions tous qu’il était gentleman-farmer en Auvergne), nous allons explorer le fond de la grotte.



Cela nous prend exactement 12 minutes et quinze secondes montre en main avant de nous retrouver autour de la table pour déguster un excellent craquelin vençois directement importé par Sophie et de savoureuses mignardises cagnoises dégainées par l’ami Bernard. Le tout est arrosé par un champagne bien frais servi par Mathieu. François nous verse ensuite un bon café bien chaud. Christophe décrète alors qu’il est temps pour lui et sa famille de lever le camp sous des prétextes fallacieux (décrotter la chienne, décrotter Camille, décrotter Sophie, etc.). Courroucé, je le traite de dégonflé et qu’il pourrait au moins trouver des excuses valables pour ne pas goûter un plein gobelet de mon excellent Armagnac XO. Penaud, il avoue avoir peur de se faire choper par les flics sur le chemin du retour. Bon joueur, je lui donne l’autorisation de partir. Dada qui ne conduit pas, demande à avoir les rations d’armagnac de Christophe, de Sophie, de Camille et de Lily.

Après j’ai un trou.

...

Je sens François me secouer avec sa délicatesse habituelle : « debout feignasse, il faut qu’on y aille, je dois récupérer ma femme chez sa sœur ». Autour de moi, Audrey, Mathieu, Dada et Bernard pioncent à poing fermé. La montre indique 16h00. Je demande : « On les réveille ? ». Il me répond : « Pas la peine. Quand ils auront cuvé, ils trouveront tous seuls le chemin de la sortie ».

Solidarité, amour, entraide, charité chrétienne, c’est tout l’esprit de Noël au GSV…

Jérôme

15 déc. 2017

Désobstruction Décembre 2017 : 14 sorties


SUR VENCE : 12 sorties (Dada + Christophe).

-Grotte des Trois Mille-Pattes (Baou des Blancs) : 3 sorties dont -2 séances de désob dans la salle du carrefour, jonction avec la salle du Théatre située en dessous, -1 séance topo avec Christophe pour topographier les nouvelles parties qu’on avait pas incluses depuis les dernières séances de l’été 2016.

-Réseau R1-Cocon (Baou des Blancs) : 1 sortie : désob dans la salle #2.

-Grotte des Pénitents (157E, Baou des Blancs) : 2 sorties. Désob nouveau réseau.

-La Foux : 4 sorties. Désob dans 157-G9 et J9.

-Plan des Noves : 1 sortie. Désob  à la faille des Erables, à la faille du Rocher en Pile d’Assiettes et à la Faille double.

-Cambrenier : 1 sortie. Prospection. 

SUR TOURRETTES : 1 sortie.
-Pic de Courmettes : prospection du côté ouest des falaises. Trouvé 3 cavités : une baume traversante, une petite fracture horizontale et un aven faille avec courant d’air, de 18m de dvt environs (à continuer). 

SUR ROQUEFORT les PINS : 1 sortie.
Prospection dans les gorges du Loup, du C2 (source du Noyer, captage) et 105-R vers l’aval. Trouvé 4 cavités.

SORTIES CLUB (en vrac, et sans forcément de CR et en plus non comptées dans le titre !):

Grotte de Mons (Pique-Nique 'orgiesque' annuel) et sortie équipement à la Turbie (Mathieu et Ondine).

Pour le club,
Christophe
(toujours Parisien)

3 déc. 2017

[CFR] L'équipement au féminin

Participants-Es : Ondine et Mathieu
TPCR (Temps de présence aux carrières romaines) : 7h

En ces temps bien sombres où les groupuscules castracistes ravagent le pays et sèment la haine et la discorde entre les femmes et les hommes, une poignée de résistants-Es n'ont pas abandonné le combat. La Commission Féminisation et Rajeunissement a fait de la défense de la féminité sa priorité étant donnée l'urgence absolue de la situation. Face à la progression rampante du neutralisé, il est devenu nécessaire de se mobiliser massivement.

La spéléologie est malheureusement trop souvent vue par les femmes comme un renoncement à leur féminité. On pense bien-sûr aux vêtements que n'aurait pas reniés Mao tant ils ressemblent à un uniforme. J'ai connu une fille charmante qui voulait inventer une nouvelle mode spéléo pour les femmes (elle avait même pensé à des bottes en caoutchouc à talon haut), mais elle a depuis préféré arrêter la spéléo. C'était pourtant une bonne idée...

L'habit ne fait pas la moniale. On pourrait croire qu'il suffit de retirer le casque qui ne rend pas intelligente, la combinaison et tout le reste, pour retrouver la féminité dans toute sa pureté, mais il n'en est rien. Les méfaits de la neutralisation se font avant tout dans l'esprit. Ce sont toutes les pratiques spéléologiques sclérosées qu'il faut revoir pour pouvoir laisser la féminité s'épanouir.

Bien-sûr, il a fallu remplacer les convocations aux sorties par les courtisaneries de rigueur et relier les cavités par des lignes de transports en commun, mais dans la pratique elle-même quelque chose manque encore.

L'instauration de l'auto-proclamation à des fonctions dirigeantes à vie uniquement en couple d'un homme et d'une femme ayant la moitié de l'âge de l'homme, a bien-sûr été un progrès considérable. Mais encore une fois, à part une renaissance miraculeuse d'un certain savoir vivre, peu de choses ont effectivement changé, les femmes restant systématiquement en retrait.

L'explication est pourtant fort simple dès que l'on considère que la logique féminine forme un tout cohérent. Prenons l'exemple de l'équipement au féminin : vous vous souvenez peut-être qu'Ondine a refusé d'équiper l'Aven des Corneilles le mois dernier. Que faut-il comprendre ? Qu'elle ne veut pas ? Exactement ! Quand elle ne veut pas, c'est qu'elle en a très très envie !!!!!!!!!

Ne vous excitez pas, il y a un "mais" : Quand elle ne veut pas, c'est qu'elle en a très très envie, mais pas à n'importe quelles conditions... (Grosse déception !)

- O. : Je n'équiperai jamais !
- M. : Si tu veux on y va tous les deux. On peut retenir une date. Tu es libre quand ?
- O. : Le 3 décembre, je suis libreeeeeeeeeee !!!!!!!!

Il lui fallait juste un peu d'intimité et un homme patient (très patient) et attentionné.

Malheureusement depuis que la spéléologie se pratique en couple, cette situation m'a mis un peu dans l’embarras. Le Co-Président à Vie de sa vie, n'a certes pas été trop dur à convaincre. Il a été trop content d'avoir un dimanche de libre pour aller faire un peu de première en solitaire (l'enfoiré !). Avec la jeune Co-Secrétaire Générale à Vie de ma vie, je ne pouvais me permettre le moindre incident diplomatique. Il faut dire qu'avec elle, j'ai trouvé celle à qui je peux dire "Tu mihi sola places" ! Pour rien au monde je ne voudrais la perdre. Je ne lui ai rien caché et elle s'est montrée très compréhensive. C'est la journée d'Ondine, la solidarité féminine ne saurait souffrir le moindre soupçon de jalousie. Elle sait qu'elle arrive elle-aussi à l'âge d'équiper, elle profite encore un petit peu des derniers moments de jeunesse, elle attendra le printemps pour me rappeler à mes devoirs et équiper à son tour.

La neige s'étant mise à tomber dès le vendredi soir, la sortie a bien faillie être compromise. Mais comme le dimanche était annoncé comme beau et frais, j'ai opté pour un repli sur les carrières romaines à La Turbie. Ondine a encore redit "non, j'en ai très très envie", nous nous sommes donné rendez-vous à l'horaire habituel en gare de Cagnes. Ce que femme veut, Dieu le veut !




Les carrières romaines offrent la vue splendide d'un lever de soleil sur Monaco ce matin. Aujourd'hui c'est la journée d'Ondine, c'est elle la Princesse. Elle prend son temps à se rassasier d'une mandarine en guise de petit déjeuner. Elle savoure ce moment en regardant le paysage. Elle me redit qu'elle n'équipera jamais et va se préparer le plus lentement possible. Elle prépare son kit. Je lui confie ma clef (de 13, pas de voiture. Faut pas déconner, c'est quand-même ici sur la route de Beausoleil qu'à été inventé l'adage "Princesse au volant, mort au tournant !". Paix à son âme...).


Pour commencer, je lui fait équiper une voie classique : 2 SP, MC, 2 SP (Y), 1 SP, 2 SP (Y). Au dernier fractionnement, elle m'appelle au secours car elle n'arrive plus à faire un Y. Aussitôt dit, aussitôt fait : je prend une deuxième corde, je remets des mousquetons sur ses amarrages et j'arrive à ses côtés. Je la laisse m'expliquer son problème : à la maison elle n'a qu'une corde molle pour s'entraîner, et là avec une vraie corde les boucles ne veulent plus rentrer. Je lui montre deux trois fois que ça rentre pourtant tout seul. Elle me dit que c'est parce que je force, ce que je déments vigoureusement, ce n'est qu'une question de délicatesse. Elle en conclue qu'une faible femme doit toujours plus écarter la première boucle et fait son nœud.

Il était temps, car elle commençait à avoir les jambes engourdies et car l'heure du repas avait sonnée. Nous remontons manger en-haut sans oublier de déséquiper avant. Son menu ressemble cette fois à un petit déjeuner, mais il ne faut surtout pas discuter ses habitudes alimentaires. Ce serait mal vu.

En guise de dessert, je lui propose d'équiper une vire plein vide. Après l'équipement soft, il est temps de passer à l'équipement hard. Sa seule préoccupation est qu'il va falloir chasser les bébêtes qui ont niché dans les spits, pour le reste ça ne la dérange pas, bien au contraire. Je lui montre comment tuer la bête du premier spit, puis je la laisse faire les autres avec répulsion. Elle n'aime pas tuer les êtres vivants. Il ne faut surtout pas que je lui dise que les végétaux qu'elle mange sont aussi des êtres vivants, sinon elle ne mangera plus rien.




Si le matin je n'ai pas eu le temps de prendre de photos d'action, maintenant je peux rattraper le temps perdu. Je la suis tranquillement avec la deuxième corde et je n'en perds pas une miette. Malgré la difficulté et les efforts réclamés, Ondine est très loin de pleurnicher. Elle ne boude pas son plaisir. Elle aime ça et elle en veut. Elle vient à bout de la vire sans aucune aide et sans qu'il n'y ait quoique ce soit à redire sur son équipement.





En ce moment de l'année, le soleil baisse de bonne heure. La fraicheur arrive. Nous remontons et rangeons tout le matériel, car il va être l'heure de rentrer. Ondine affiche un visage comblé. Elle n'équipera jamais, mais je crois qu'elle y a pris goût !

Mathieu





26 nov. 2017

Lapin au cidre

Participants : Alexandre, Bernard, Daniel, François, Mathieu, Jérôme
TPST : 3h

Partant du principe que c’est dans les vieilles marmites qu’on fait les meilleures soupes, le GSV organisait ce dimanche une sortie de reprise pour notre doyen Bernard, de retour parmi nous. Partant du principe qu’il faut également de jeunes carottes pour réussir la soupe, ce fut aussi l’occasion d’initier Alexandre à la progression sur corde. Le garçon ayant déjà tâté de l’escalade, il fut décrété qu’il officierait directement sur le majestueux P25 de l’aven du Lapin. Pour fêter ce double évènement, j’amenai 150 centilitres d’excellent cidre breton. D’où le titre finement choisi de ce compte-rendu.





A dix heures et sous un soleil radieux, les heureux participants se retrouvent à Roquefort-les-Pins. Une heure plus tard, le fringant Alexandre s’introduit dans le Lapin équipé en double, à la suite du Président Dada qui a fait office de formateur pour l’occasion. Il a bien fallu qu’il s’y colle, Mathieu ayant décidé de ne former désormais que les jeunes filles en fleur. Je lui fais remarquer qu’au rythme où on les recrute, il ne risque pas de trop se fatiguer dans les prochains mois, voire les prochaines années…






Je descends ensuite, suivi de très près par Mathieu qui a décidé de me tirer le portrait. La vieille garde ferme la marche et le « bas les pattes ! » proféré par un François offusqué aux prises avec les élans affectueux de Bernard sur la corde, nous confirme que ce dernier n’a rien perdu de sa verdeur malgré quelques mois d’abstinence spéléologique.





Il est midi tapantes lorsqu’après avoir fait découvrir à notre ami Alexandre les joies de la reptation en milieu confiné, nous débouchons dans la grande salle joliment concrétionnée qui accueillera nos agapes. Trois tournées de cidre plus tard, et une fois le café aimablement servi par Alexandre, Mathieu sort de son kit une bouteille de verveine artisanale concoctée par sa maman, et dont nous avons eu la primeur lors de la réunion club précédente. Il faut préciser que le divin breuvage a été confectionné par Madame Mathieu Mère selon des recettes savoyardes ancestrales avec de la verveine fraîche amoureusement cueillie au fond du jardin familial. L’extraordinaire parfum et le retour aromatique associés à une faible teneur en sucre font oublier les 50° que doit afficher la liqueur. J’ai droit à trois doigts et le Président, honneur à sa fonction, se voit généreusement octroyer une main. Les deux ancêtres déclinent et Alexandre accepte poliment une demi-phalange. Le digestif faisant rapidement son effet, la discussion dévie sur la rude vie dans les montagnes de Savoie où la consanguinité fait rage et où les goitres poussent comme des champignons. Mathieu nous explique que le savoyard utilise l’alcool pour pallier au manque d’iode dans l’eau. Le Président demande si les expressions « Crétin Dauphinois » et « Fondu Savoyard » qualifient bien le simple d’esprit montagnard qui a un peu trop bu d’eau du pré. Mathieu, vexé, lui rétorque que ça n’a pas dû lui arriver bien souvent, à lui, de boire de l’eau, du pré ou pas. Notre Secrétaire Général est susceptible quand on commence à le chambrer sur le pays de ses ancêtres… Pour clore le repas, je fais tourner quelques pères Noël en chocolat. François en profite pour nous préciser que la symbolique du Père Noël n’a rien de religieux et qu’il n’apportera pas sa caution théologique à cette dégustation purement païenne. Mathieu fait remarquer que l’intérieur de la friandise est creux et râle parce qu’il aurait aimé que ce soit fourré. L’œil du Président Dada s’allume alors et, partageant son Père Noël en deux, il verse derechef dans chaque moitié une bonne rasade de liqueur. Fier comme un bar-tabac, il nous présente « le Père Noël fourré à la Verveine » et les gobe aussi sec. La descente de cet homme m’étonnera toujours. A Alexandre qui le fixe avec des yeux ronds j’explique que les fonctions présidentielles au GSV nécessitent une bonne descente, ce qui explique l’exceptionnelle longévité de Dada à ce poste.

Avant de remonter, le Président tout guilleret nous convie à aller explorer une « salle voisine » pour digérer un peu et faire connaître à Alexandre les charmes du cheminement en étroiture. François demande à ce que nous ne traînions pas trop car il a une solide envie de déféquer (rappelons que le règlement de la FFS interdit formellement de chier sous terre) et il en profite pour nous réclamer du papier. Bernard lui répond qu’il n’a qu’à s’essuyer avec les doigts. Cette parenthèse scatologique refermée, je m’enfile à mon tour dans un diverticule de bon aloi qui débouche sur une belle salle concrétionnée. Agréablement surpris, je fais remarquer à mes camarades que la décoration de cette salle me rappelle vaguement celle où l’on vient de manger. Mathieu et le Président s’étranglent de rire en me rétorquant que c’est la même salle et que notre promenade digestive n’était qu’une boucle qui nous a fait revenir au point de départ. Il est vrai que je n’ai généralement aucun souvenir de la topographie des trous que je visite d’une fois sur l’autre (en général de un à quatre ans), mais c’est la première fois que ça m’arrive à un intervalle de dix minutes… A mon avis, il n’y avait pas que de la verveine dans la liqueur à Maman.

Mathieu et moi attaquons la remontée, suivis par François et Bernard. Dada et Alexandre grimpent en dernier, le premier formant le second aux rudiments du crolle et du jumard. Il convient de noter que notre initié de frais a été plutôt rapide à sortir du trou, soit parce qu’il en avait marre d’entendre nos bêtises, soit parce qu’il en avait marre de la spéléologie en général. Il faudra le lui demander si un jour on le revoit. François, d’humeur facétieuse, nous propose de faire couiner le Président en lui retirant la corde avant qu’il ne s’accroche dessus. Ça ne loupe pas et un braillement caverneux venu du fond nous informe que la méchante blague a réussi. Il est 14h quand Dada passe la tête hors de la cavité.










Le lapin au cidre est au final une bonne recette que nous referons certainement.

Jérôme
(Avec les photos de Mathieu)

 

19 nov. 2017

Aven Ricounaum

Participants : Ondine, Daniel, Jérôme, Mathieu
TPST : 4h20

Température clémente et beau soleil sont au rendez-vous ce dimanche au Bois de Gourdon, de même qu’une délégation scientifique du GSV emmenée par le Président Dada, son sbire Mathieu, la toujours chatoyante Ondine et votre serviteur.

Thème de la sortie en prise directe sur l’actualité :

« Le harcèlement sexuel en milieu souterrain : mythe ou réalité ? »

Pour éclairer le débat, l’anthropologue Ondine fera à la fois office de caution scientifique et de témoin féminin. La question étant d’autant plus prise au sérieux par le GSV que le microcosme spéléologique est en grande majorité beaucoup plus masculin que féminin, le Président a banni toute dégustation de vin afin de garder l’esprit clair et synthétique. Seul un café chaud est autorisé.

Le décor de l’étude est un aven découvert et toujours exploré par l’ASBTP, caché au fin fond du Bois de Gourdon et dont les travaux de désobstruction butent depuis des années à la cote – 166 m faute de personnel volontaire… A l’origine, nos amis Niçois envisageaient d’atteindre le cours d’eau souterrain dont le murmure discret se fait entendre au fond du trou. Le mystère reste entier mais la cavité est toujours équipée, ce qui sied fort au Président Dada qui en a marre de se taper le lavage des cordes après chaque sortie club.

Nous atteignons l’entrée du Ricounaum vers 9h45 et nous changeons sur place : ce sera le premier atelier. Ondine constate qu’elle devrait, pour éviter de susciter des comportements inadéquats, aller s’équiper à l’écart. Je lui fais remarquer qu’elle doit faire attention où elle met les pieds parce que je venais juste de déféquer dans la zone où elle souhaitait s’isoler… Elle note scrupuleusement cette remarque scatologique et rajoute qu’elle devra renoncer à mettre des dessous en dentelle lors des sorties spéléo. Dada et moi acquiesçons de concert, Mathieu plus mollement...



A 10h10, Daniel est le premier à pénétrer le trou suivi de votre serviteur et d’Ondine, Mathieu fermant la marche. Très impliqué dans l’étude, ce dernier demande si « pénétrer le trou » est une expression qui ne porterait pas à interprétation sexiste ? L’experte Ondine regarde alors ses notes et ne voit pas de double sens dans la phraséologie utilisée. A propos de « double sens », Mathieu, décidément très à fond dans son sujet, tend à y déceler une connotation diablement sexuelle. Le Président, un peu à l’ouest, demande s’il s’agit d’une double pénétration. Je lui répond qu’en fait c’est une quadruple pénétration, vu que nous sommes quatre à investir l’aven, et qu’il devrait commencer à avancer si on veut être à l’heure en bas pour le déjeuner.

Le Ricounaum débute par une série de ressauts étroits qui conduisent ensuite vers un P40 fractionné en 3 fois. De temps à autre un boyau savamment élargi par nos amis de l’ASBTP nous rappelle que le trou ne s’est pas livré aussi facilement aux premiers explorateurs. C’est d’ailleurs à l’entrée d’un de ces boyaux réalésés que Mathieu nous encourage avec un « Enfilez-vous ! » jovial. J’émets alors une observation sur la signification exacte de ce terme : nous enjoint-il à nous accoupler contre nature dans le diverticule sus-nommé, ou nous invite-t-il plus simplement à presser le mouvement ? L’anthropologue Ondine répond que les celto-ligures qui peuplaient nos contrées azuréennes bien des millénaires avant J.-C. pratiquaient déjà les rapports plus ou moins librement consentis à l’abri des regards, au besoin dans des souterrains ou anfractuosités. Lorsque je lui demande si les celto-ligures pratiquaient aussi la sodomie, elle me répond qu’elle ne sait pas parce qu’elle n’était pas encore née à l’époque. Le Président souffle, ce qui dénote une forme d’impatience chez cet homme au visage d’habitude impassible et le groupe s’ébranle.

La descente du P30 terminal constitue la cerise sur le pompon du Ricounaum (il faudra quand même un jour demander à l’ASBTP d’où vient ce nom ridicule…). Autant la cavité n’a présenté jusque là d’autre intérêt qu’une descente plutôt sportive, autant le beau volume et les parois annelées du puits valent le coup d’œil. A peine arrivé en bas, j’entends le bruit caractéristique d’une roche frappant la paroi et tombant vers moi à la vitesse de la gravité multipliée par le carré de la circonférence plus Pi. Flairant la tentative d’homicide involontaire de la part d’Ondine qui me suit, je n’ai que le temps (1 seconde) de plonger à l’abri d’un surplomb, mais mon genou gauche à la traîne ramasse l’impact. Que soit remercié ici le fabricant de genouillère spéléo renforcée dont le produit a protégé ma rotule. Je m’en tirerai avec un bleu. Lorsqu’Ondine me rejoint, je lui demande pourquoi elle a essayé de m’éliminer alors que je n’avais proféré aucune insanité sexiste depuis au moins cinq minutes. Elle me présente ses plus plates excuses pour mon genou, précisant qu’en fait elle visait ma tête. Je lui fais remarquer qu’elle aurait pu m’envoyer un caillou moins lourd (l’engin faisait bien son kilo). Penaude, elle m’avoue qu’elle n’a pas fait exprès et qu’en fait ce puits parpine dangereusement. Je lui pardonne, mais la question essentielle est désormais posée : est-ce qu’une remarque déplacée à caractère sexuel justifie l’élimination physique de celui qui l’a proférée ? Mathieu qui vient de nous rejoindre, répond pour sa part qu’entre la fracture du crâne et l’émasculation, il préfère de loin la fracture du crâne… Le Président qui est revenu sur ses pas nous demande si « on n’a pas encore fini avec nos conneries » et nous invite à nous « bouger l’oignon». Taquin, je lui explique que si Ondine doit se « bouger l’oignon », elle va donner des idées à Mathieu qui va se mettre à baver, etc, etc. J’évite de peu une motte de terre présidentielle à tir tendu et nous nous acheminons vers le terme de la visite.

L’intérêt avec les sorties spéléologiques à caractère socio-ethnologique, c’est qu’on ne voit pas le temps passer. Résultat : à 11h30 on est au fond du Ricounaum. Point encore affamés, nous grignotons distraitement nos casse-croûtes tout en ordonnant les réflexions émises depuis le début de cet étude sur le harcèlement sexuel souterrain. Ondine relit ses notes et énumère ses constats :

- Au GSV, on dit autant de bêtises en surface qu’en dessous.

- Ces bêtises prennent souvent, et par force, une connotation sexuelle car la spéléologie est une discipline où le vocabulaire technique emprunte beaucoup à l’anatomie humaine et à la gestuelle procréatrice (« boyau », « orifice », « cavité », « fistules », « pertes » « s’enfiler », « pénétrer », « désob » (pour « désobstruction » et non pour « des zobs », etc.).

- Ceux qui les débitent en disent plus qu’ils n’en font. Pas étonnant, vu que la moyenne d’âge des spéléologues français tourne autour de 67,5 ans et qu’à cet âge-là...

En conclusion, notre anthropologue distinguée ne voit pas trace de harcèlement dans la pratique des activités spéléologiques, et en tant que (rare) membre féminin du club, elle ne sent pas de tension sexuelle malsaine dans ses relations avec les membres masculins (quand je dis « membres », on se comprend, mmh…), tout au plus une grivoiserie de bon aloi qui n’est pas sans lui rappeler les banquets bien arrosés auxquels s’adonnaient nos ancêtres celto-ligures.

Le Président approuve et Mathieu et moi entérinons le résultat de cet étude menée avec brio et rigueur. Il est donc l’heure de remonter. Mathieu ouvre, Ondine suit, je me traîne misérablement derrière (décidément je manque de pêche en ce moment) et le Président ferme en ronchonnant.

Il est 14h30 lorsque Dada sort du trou. Il se fiche de moi, je suis vanné, Mathieu prend des photos et Ondine glousse : l’ordre immuable du GSV dans toute sa simplicité, loin des débats sociétaux délétères...
Jérôme







 (Avec les photos de Mathieu)