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20 avr. 2025

Chinoiseries tchécoslovaques à la Belle-Borie

Participants : Daniel, Francis, Jérôme, Sacha, Yannick
TPST : 5h

Après des semaines de temps pourri empêchant toute sortie dominicale, le GSV (Groupe Spéléologique Viticole) retrouve enfin le chemin des sous-sols. Pour l'occasion le Président a convoqué la fine fleur des initiés de frais du club. L'affaire n'était pas gagnée car un déluge s'était abattu sur la région la nuit d'avant.

Nous sommes convoqués à 9h30 au parking du plan des Noves à partir duquel 45 minutes de marche nous seront nécessaires pour atteindre l'aven de la Belle-Borie : 53 mètres de profondeur découpés en quelques petits puits et un P20 terminal. Idéal pour une reprise en douceur et pour la paire Yannick-Sacha (paire et fils) qui ne se voyait pas trop se manger des fractionnements de corde jusqu'à moins 150 mètres. Francis, qui avait un souvenir mitigé de sa dernière expédition au Calernaum, applaudit des deux mains. C'est donc dans un air limpide fraîchement nettoyé par la pluie et sous un soleil bienvenu que nous traversons le plan des Noves au milieu des restanques effondrées, bories et autres bergeries ruinées témoins du passé agro-pastoral du plateau. Comme à son habitude le Président nous désigne deci delà l'un des mille cinq cents trous qu'il a découvert dans le secteur. Son doigt pointe régulièrement quelques touffes de thym par-ci ou un amas de cailloux par là qui dissimulent en général un terrier de blaireau infesté de puces, élargi par ses soins et ne descendant pas à plus de quelques mètres dans les entrailles de la terre. L'aven de la Belle-Borie, avec ses 53 mètres, s'avère être la plus profonde découverte présidentielle sur le plan des Noves.

Il est 10h30 quand nous arrivons à l'aplomb du trou qui, comme son nom l'indique, est situé à une vingtaine de mètres d'une borie à la curieuse architecture géométrique, et dénuée de tout confort moderne.




Nous nous équipons, ce qui permet à Yannick et Sacha d'exhiber fièrement leurs baudriers tchécoslovaques achetés sur les conseils de votre serviteur. Avantage de ces harnais : une vraie taille unique qui convient aussi bien au très svelte Sacha qu'au très confortable Yannick. Francis, pas en reste, nous brandit sous le nez un bloqueur de pied chinois tout neuf qui est une contrefaçon très fidèle de la première génération de Pantin Petzl. Comme ce n'est pas un équipement de sécurité, le Président (gardien du dogme fédéral en l'absence de notre ami Mathieu) l'autorise à l'étrenner sous terre. Ce que Francis, en bonne tête de linotte, s'empressera de ne pas faire en l'oubliant dans sa voiture.


Il est 11h quand Daniel s'enfile dans le trou (déjà équipé de cordes). Francis lui colle au train, suivi de Yannick et Sacha, tandis que je ferme la marche. Nous descendons tranquillement le petit puits d'entrée que nous quittons deux mètres avant le fond pour nous insérer en marche arrière dans un boyau latéral menant au ressaut suivant. Cela donne lieu à d'aimables contorsions et à quelques ralentissements. L'inaction spéléologique récente n'a pas rouillé nos amis et les gestes reviennent naturellement. Nous dévalons une vingtaine de mètres avant de monter en main courante vers l'exigüe mais ô combien concrétionnée jolie salle qui accueillera notre déjeuner. 




Entre les champignons, les aragonites, les stalactites et les draperies qui s'élèvent jusqu'à huit mètres de haut (c'est en fait un puits remontant obturé) poser ses bottes et son cul au milieu est une tâche peu aisée : le Président surveille nos mouvements, prêt à excommunier le premier qui niquera une concrétion.






Comme par hasard il est midi tapant quand nous achevons de nous extasier et de mitrailler le décor. C'est l'heure de l'apéro. Francis, réglé comme du papier à musique, débouche un puisseguin-saint-émilion de 2020 qui s'accordera à merveille avec les petits-fours de Yannick. 



Le repas se déroule dans la bonne humeur habituelle avec le déglinguage en règle de tous les absents (qui ont de toute façon toujours tort) et de leurs pratiques sexuelles déviantes respectives. A la fin du  déjeuner Dada exhibe une bouteille de crémant d'alsace qu'il a apportée pour fêter son anniversaire. J'en profite pour sortir un sachet d'oeufs en chocolats car nous sommes aussi le dimanche de Pâques. Le jeune Sacha me chuchote "C'est rigolo, j'avais jamais remarqué que le Président était coiffé comme un oeuf !". Ces gamins ne respectent rien ni personne. Après le café, Yannick nous sort une fiole médicinale remplie d'un liquide rougeâtre qui n'est pas sans rappeler l'urine sanguinolente d'un malade en phase terminale. Fier de son effet, le garçon nous fait son plus beau sourire d'ancien médecin nazi et nous révèle qu'il s'agit de sa dernière composition à base de rhum et de pétales de roses de Pont-du-Loup cristallisées dans le sucre. Reconnaissons honnêtement que c'est bien meilleur que de l'urine sanguinolente. Et surtout beaucoup plus traître.




C'est donc dans une béatitude toute éthylique mâtinée de nonchalance digestive que nous descendons les deux P5 et P20 terminaux qui n'ont de remarquable que le seul fait de nous faire toucher le fond. Et donc de remonter.


L'alcool ayant un peu brouillé l'ordonnancement de la progression, Francis part comme une fusée, suivi de Yannick et Sacha plutôt du genre limace. L'encadrement fédéral (le Président et votre serviteur) reste à la traîne en finissant de cuver le rhum urinaire. Dada avait naturellement demandé à nos oiseaux de ramasser leurs kits respectifs dans la salle du repas à mi-chemin de la sortie. Soit le Président avait mal articulé, soit le cerveau de Francis n'avait pas imprimé, toujours est-il qu'arrivé pratiquement au puits d'entrée, ce dernier dut redescendre récupérer son sac sous les quolibets de ses impitoyables camarades.



A seize heures la mauvaise troupe était dehors après une remontée sans problèmes au cours de laquelle Yannick put apprécier les bienfaits du bloqueur de pied que je lui avais prêté. Seul Sacha eut à se plaindre de son baudrier des balkans un peu trop lâche qui lui laminait ses tendres roubignolles.




Francis en profita pour se maudire d'avoir oublié son Pantin chinois tout neuf dans la voiture. Il le récupéra pour nous le montrer une dernière fois et je lui demandai quelle était cette mystérieuse marque SOB gravée sur l'engin. Yannick, qui parle plusieurs langues, dont la langue fourrée, nous donna une traduction en anglais ("Son Of a Bitch") et en mandarin ("Petit papillon flatulent s'éloignant dans le crépuscule triomphant"). Dada rassura les deux fétichistes du Pantin (chinois ou original) en leur promettant un nouveau trou encordé très prochainement. Le jeune Sacha marmonna que c'était encore un truc de vieux et que lui n'en avait pas besoin pour remonter tant qu'on lui tenait la corde. Ils sont quand même gonflés ces gosses...



Jérôme 
(avec les photos de Yannick et Francis)

19 nov. 2023

Vestiges anciens et beaujolais nouveau à la Belle Borie

Participants : Bernard, Daniel, François, Jérôme, Mathieu

TPST : 2h30

Notre momie préférée et doyen certifié des spéléologues actifs dans les Alpes-Maritimes est de retour par minou (chat alors !). Le vénérable Bernard (82 piges aux prunes) aussitôt débarqué de sa Charente-Maritime a téléphoné au père François et lui a fait part d'une violente envie de se frotter à de la corde. Notre séminariste perverti ayant compris que l'égrillard vieillard voulait se livrer à des pratiques masturbatoires fétichistes à base de chanvre lui a de fait raccroché au nez : pas de ça au Club ! Il a fallu tout l'entregent du Président Dada pour que le malentendu soit rapidement levé : le Priapique Canonique voulait tout simplement se remettre à la spéléo verticale après de longs mois d'inactivité, et ce dans une cavité peu profonde et sans-trop-d'étroitures-merci. Daniel a ainsi dû farfouiller dans ses fiches pour trouver le trou idéal : l'aven de la Belle Borie, ses 5 puits et ses 53 mètres de profondeur.

Le commando de vieillasses a rendez-vous à 9h30 au parking du GR menant au Plan des Noves, route du Col de Vence. Avec le retour de Bernard, la moyenne d'âge du Club a pris une vieille claque et le GSV penche désormais plus du côté de l'EHPAD souterrain que de l'association sportive culture et jeunesse. Votre serviteur ayant à coeur d'atténuer le caractère gérontologique de la sortie a voulu insuffler un peu de nouveauté en apportant une bouteille de beaujolais... nouveau ! Mathieu fait naturellement la grimace en râlant sur ce pinard chimique fabriqué en un mois et qui attaque impitoyablement le système urinaire et fissure l'anus. Je lui rétorque sèchement que la nouveauté est à ce prix et qu'aujourd'hui nous avons bien besoin de nouveauté au GSV. Le Président coupe court au débat en nous annonçant qu'il y a quarante minutes de marche pour arriver au trou et qu'il faudrait se bouger l'anus justement. Don Francesco ayant depuis peu récupéré le quasi-usage de son genou fait remarquer qu'il avancera moins vite que d'habitude pour s'économiser la rotule. Dada soupire, lève les yeux au ciel, et nous nous ébranlons finalement. 

Le temps est anormalement doux pour un 19 novembre et le ciel irrémédiablement bleu. Il nous faudra presque une petite heure pour atteindre l'aven qui tire son nom d'une jolie borie inachevée plantée à quelques mètres de là. Cette découverte présidentielle est actuellement le plus profond gouffre du Plan des Noves et il est toujours en cours de désobstruction par le Grand Homme. Comme il est équipé de façon permanente, nous descendrons légers, sauf mézigue qui se coltinera le kil de rouge dans un kit rembourré. Il est onze heures lorsque que nous nous introduisons dans le puits d'entrée de 6 mètres. Dada ouvre la marche, je le suis et précède Mathieu qui a pour mission de surveiller les deux vestiges. La descente se fait sans encombres jusqu'à une petite salle sise à moins quinze mètres et dont le magnifique concrétionnement servira de décor à notre déjeuner. Bernard et François nous y rejoignent sans avoir exprimé le moindre reproche : le Président a bien choisi son trou. Pour fêter ça je débouche la fameuse bouteille de pseudo-vin. Finalement, le délicat Mathieu lui trouve quelque agrément alors que François le juge infect. Je le rembarre en lui suggérant de retourner picoler son vin de messe. Le chanoine déviant (comme l'eau) se rebiffe et m'assène que le vin de messe c'est du blanc et pas du rouge. Je vois rouge justement et lui rétorque que Jésus avait du sang rouge aux dernières nouvelles et pas blanc, sinon ce serait du sang de navet. Le fourbe Bernard vient jeter un peu d'huile sur le feu en expliquant que si les curés servent la messe avec du vin blanc c'est pour ne pas se tacher la bure quand ils s'en foutent partout les jours où ils ont un coup dans le nez. Don Francesco crie au blasphème, Mathieu se bidonne et il faut toute l'autorité présidentielle pour ramener la conversation sur des sujets de discussion plus habituels au GSV, à savoir les pratiques sodomites en milieu souterrain et les remontées d'urgence en cas de chiasse incontrôlable. 

Il reste deux puits avant le joli P20 terminal et c'est donc l'esprit clair (la bouteille n'a même pas été finie) et apaisé que notre délégation les dévale. Les deux ancêtres ne feront pas le voyage au fond du puits final, Bernard parce qu'il veut préserver la bête pour cette sortie de reprise, et François parce qu'il réprime depuis l'entrée une formidable envie de débourrer qui nécessite une remontée pas trop tardive. Mathieu et moi toucherons donc le fond (on a l'habitude...), le Président s'arrêtant à mi-puits pour évaluer une possibilité d'exploration d'un conduit latéral prometteur. Tout ce joli monde sort la tête du trou aux alentours de 13h30.

Sur le chemin du retour, Daniel veut nous montrer la centaine de cavités qu'il a ouvertes dans le coin. Nous nous contenterons d'en apercevoir une demi-douzaine car c'est-bien-joli-tout-ça-mais-il-y-a-encore-quarante-cinq-minutes-de-marche-jusqu'aux-voitures.


Jérôme 


L'aven de la Belle Borie filmé par Mathieu lors d'une sortie précédente :