31 oct. 2021

Essais de torches à LEDs au Cataphot en 2020

Date : 28 Juin 2020
Participants : Jérôme, Daniel et Mathieu
TPST : 6h ?

Quand il pleut et qu'on ne sait plus quoi faire le dimanche, on en vient à ressortir de la poubelle une série de RAWs faits en 2020 à l'occasion d'un essai peu concluant de deux magnifiques torches à LEDs, dénichées dans l'empire du milieu par Jérôme à un prix défiant toute concurrence, batterie comprise. Il les avait munies de filtres oranges garantis 3200K à la suite d'une première déception avec les 5400K de base. Comme il les a choisies pour leur puissance, on s'est retrouvés au Cataphot pour voir ce que ça pouvait bien donner.

De retour à la maison, quand il a fallu s'attaquer au traitement, j'ai été incapable de sortir quoi que ce soit de montrable et j'ai abandonné pendant plus d'un an sans arriver à comprendre. Mais après avoir renouvelé l'expérience début Septembre au Petit Agneau et y avoir passer plus d'un mois et demi dessus, je suis maintenant capable de sortir les photos et surtout de sortir un commentaire :

  • Les deux filtres oranges n'ont pas la même teinte.
  • Le compte en Kelvin n'y est pas du tout. Le moins pourri est aux alentours de 2600K, le second est encore beaucoup plus bas.
  • L'indice de rendu des couleurs (IRC) est insuffisant. C'est ce qui arrive quand on privilégie la puissance des LEDs.
  • Les torches sont relativement encombrantes et fragiles.
  • N'en jetez plus !

Pour tout à fait honnête, avec deux torches seulement, le bas du puit a dû être éclairé avec une lampe suisse à 3000K, avec un IRC de 80 largement insuffisant aussi. 

Voici donc les photos, je vous laisse juger :













Ma recommandation est donc de les revendre au plus vite. Très prochainement, nous allons tester un autre modèle, mais cette fois choisi par mes soins. Il faut juste qu'il arrive par la poste et qu'il arrête de pleuvoir.

Mathieu

30 oct. 2021

Désobstruction Octobre 2021 (Enfin à jour!! Du neuf au Plan des Noves; 15 sorties)

 Sur Vence (6 sorties)

Secteur du Plan des Noves

-Aven de la Belle Borie (découverte et ouverte par le GSV en 2012) : suite à la revisite de cette cavité le mois précédent, une lucarne est entrevue dans le puits d’entrée puis est ouverte ; elle donne accès à un nouveau réseau ventilé, une série de puits bien larges, de belles concrétions et se termine par un beau vide de 20m de haut qui clôt pour l’instant l’exploration. La cavité est en cours d’exploration évidemment, il y a encore pas mal de suites à ouvrir, d’escalade à faire dans un gros puits remontant, d’étroitures à forcer, de pendule à faire dans le puits terminal pour accéder à ce qui semble être une galerie. Le fond du puits terminal fait 5m par 2m et nous sommes à -53m de profondeur, avec un développement estimé à 150m, ce qui fait que cette cavité devient de facto la cavité la plus profonde du Plan des Noves ET la 2e cavité la plus profonde de la commune, après « notre » grotte des Trois Mille Pattes. Et ce qui intéresse aussi les spéléos de base vençois que nous sommes et qui connaissent les légendes locales, nous sommes à peu de distance des gorges de la Cagne, pas loin du Riou de Cagnes et à mi-distance de l’embut du Puei d’Arène et de la source...Ce qui fait pas mal de coïncidences intéressantes et qui font que cette cavité mérite un peu d'attention même si il faut marcher pour y arriver…La suite au prochain épisode (ou à la réunion de mercredi soir).

Sur Roquefort les Pins (8 sorties)

-Aven Berraud (Secteur du Camouyer, Dada, 1*) : désob du terminus à -7m.

-Aven de la Maison des Chasseurs (Secteur Pibou-Haut, Dada, 1*) : désob suite à -4m.

-Aven des Biquettes et Aven du Chévrier (Secteur du Camouyer, Dada, 4*) : désob de la suite à -5 et à -3m.

-Grottes du Collet -A- et des Fougères -B- (Secteur le Collet, Dada, *1) :

A - Grottes du Collet découvertes en 2011, entrée sur fracture de 2m de diamètre, haute de 1,9m, au sommet une lucarne de 0,8 par 0,4m donnant accès à une cheminée d’en gros 1m de large par 4m de haut. Une revisite ce mois-ci permet d’élargir le sommet de cette cheminée et de gagner 1m ; la suite est pour les ‘mini souris’ dixit Dada.

B - Grotte des Fougères découvertes en 2011 lors d’une séance de prospection avec Christophe, au pied d’une grande barre rocheuse visible de la D7. Prof de -3,8m, dev de 6,5m environs. Revu le chemin d’accès bien marqué partant en rive gauche de la Miagne, donnant accès au sommet de la barre, puis descente par le côté gauche.

-Prospection dans les Gorges du Loup, comme le mois précédent, en amont du C2. Retrouvé la Fracture vue le 16/2/2018. Ouverture de l’entrée, avancé sur 4,7m. Vue encore sur 2m très étroits et sans suite évidente. Un peu plus loin, revu l’entrée de la Grande Faille de la Reculée, découverte elle aussi en 2018 (prof de +5,5m, Dev 12,5m) ; la remontée de la cheminée reste à faire.


Sur Calern (1 sortie désob interclub, Michel du Garagalh, Pierre du GSVence / Martel)

- TPST : environ 5h.

Devant le trou à 10h, on commence la descente. J'équipe le R5 pour la sortie. Aucun courant d'air perceptible sauf au fond où un très très léger courant d'air aspirant nous évite de baigner dans le gaz trop longtemps.

On attaque le méandre tranquillou. 6T plus tard, la chicane droite/gauche laissée après la séance du mois de mai n'est plus mais laisse place à un troisième virage à droite avec la suite toujours aussi étroite.

On remonte peinards.

 

-SORTIES CLUB : (sans forcément de compte-rendu ; sorties non comptabilisées dans le nombre de sorties du titre, sorties en club, en solo ou binôme si un/des noms est/sont spécifié(s)) :

-Grotte du Revest-Grotte du Feu (Gourdon, sortie club avec le remarquable retour d’Audrey !) ; Grottes de ‘la Baume qui remonte’ et de la Baume Chabert 157Y2 (Secteur des Baous, Vence, visite avec Nicolas, notre nouveau membre, le 3e géologue du club, la relève est assurée, c’est cool).

Pour le Club,

Christophe

24 oct. 2021

Réincarnation au Revest

Participants : Audrey, Daniel, Mathieu et François
TPST : 5h30

En ce beau dimanche très ensoleillé de la fin octobre (on appelle cela l'été indien), il ne reste plus que trois rescapés dont des retraités fatigués, surtout depuis l'adhésion rapide de notre copain spéléo NPJ au club des handicapés du GSV (après Rémy, Bernard, Christophe...). Celui-ci n'a trouvé rien de mieux que d'aller mettre les doigts où il ne fallait pas, en l'occurrence la chaine de sa moto ! Résultat : un mois d'arrêt de travail et pas de spéléo de surcroit. Donc, finis l'ambiance et le rouquin, et bonjour la morosité. Je sens les larmes me venir !!

Nous nous retrouvons au parking en bas de la grotte du Revest pour 9h30. Mais quelle n'a pas été l'agréable surprise que j'ai eue lorsque j'attendais Dada et Mathieu, de voir arriver notre charmante Audrey ! nous ne l'avions pas vue en spéléo depuis au moins deux années ! Ecarquillant les yeux je me suis dit: "C'est notre ami Jérôme qui n'a pas voulu manquer cette sortie, et qui s'est réincarné en une sirène nommée Audrey", Quelle joie se fut pour nous. Mais hélas Jérôme n'étant pas là, nous avons constaté que nous n'avions pas de vin, pour fêter cela ! Ca ne fait rien, on s'en rappellera MPJ !

Nous partons tous les quatre pour la grotte du Revest. La montée est toujours aussi raide, sur un sentier qui n'avait parfois que le nom ! Après 1/2 heure de sudagne nous arrivons à l'entrée et nous nous équipons.

Nous entrons dans la cavité, il est alors 10h30. Nous dévalons rapidement la grande galerie, et après quelques photos et l'accueil de quelques chauves souris se plaignant d'être dérangées dans leur sommeil, nous arrivons au tobogan où la corde frotte pas mal (il demanderait à être ré-équipé sérieusement). Nous voila ensuite à la vire sur le petit lac de - 90, qui elle aussi demanderait à être refaite, parce qu'elle n'est pas commode à franchir dans sa partie centrale : Audrey à l'aller et François au retour ont eu besoin de l'aide de Mathieu pour la franchir !







En bas du tobogan, François jette un œil au passage sur le départ la diaclase nord qui va vers la Baume des Caranques, elle est remplie d'eau sur 1 m de profondeur pour au moins une dizaine de mètres de long, et pourtant il n'a pas plu depuis pas mal de temps !

Après cette petite péripétie, et la suite de photos dans la galerie, nous cassons la croûte en haut du puit de 25m, sans vin et dans un silence religieux, on entendrait les chauves souris voler ! Eh bien oui, nous étions sérieux et sobres ! n'étions-nous pas accompagnés par la réincarnation de NPJ, qui elle, méritait une tenue digne et non paillarde telle que parfois nos excès nous ont entrainés !

Nous descendons ensuite le p 25, et arrivons après une belle descente de fin gravier assez remarquable pour la cavité, au siphon de -109m. Après la pose photo, nous remontons, et nous nous enfilons dans la galerie menant à la sortie par la grotte du Feu. La galerie très chaotique en monta/cala, posa quelques problèmes à Dada, pour trouver le bon passage ! le p 12 au milieu lui posa aussi des problèmes pour le rappel de la corde passée sur un amarrage naturel, (4 reprises lui ont été nécessaires). Au passage Dada nous montre quelques ossements d'ursus spéléus trouvés par des archéologues au point bas de - 35, d'où le nom initial de grotte de l'ours.



Finalement nous arrivons à la sortie de la grotte du feu, il est alors 16h. La remontée vers la grotte du Revest fut assez exposée, tout le vallon ayant été raviné (un souvenir de la tempête Alex ?). Nous nous changeons sous le porche, et entamons la redescente en 25 mn vers les voitures après quelques glissades sur les éboulis.







Voila en fait une bonne sortie spéléo complète agrémentée de notre sympathique réincarnation de Jérôme, dont nous souhaitons la sortie parmi nous plus régulière, ainsi qu'aux fainéants trop fatigués ou handicapés, qu'il faut tirer de leur lit !

François.

12 oct. 2021

Travaux tinanerculéens à l’Embut du Débram!

Résumé: cet article décrit la désobstruction effectuée dans une cavité peu connue de Roquefort-les-Pins (Alpes Maritimes) -l’embut du Débram- par un petit groupe de spéléos depuis sa réouverture en 1992 jusqu’à l’accès au terminus actuel, 380m plus loin et 55m plus bas- fin 2017. On y parlera de géologie -pour expliquer le contexte général, on donnera des explications sur la raison de nos travaux le tout agrémenté de photos et d'un petit film.


Introduction

 

Au quartier des Terres Blanches, sur le plateau calcaire de Roquefort les Pins, tous les promeneurs du dimanche, tous les cueilleurs de champignons, les cavaliers, en bref tous les amoureux de la nature qui cherchent un coin tranquille connaissent cet endroit. Mais imaginent-ils ce qui se trouve sous le champ -dit des 'Bertrands’- situé au bout d’un petit chemin forestier?

Sur la bordure Ouest de ce pré, cachée en partie par un gros roncier constitué de muriers, de gratte- culs et autres plantes auxquelles on n’aime pas se frotter se trouve la petite entrée d’une cavité qui se remplit d’eau quand il pleut. Son nom ? Dans l'inventaire des cavités karstiques littorales des Alpes Maritimes, il porte le numéro guère poétique de 105-F1; on préfère l'appeler l’embut du Débram, qui tire son origine du patois provençal. Ou bien le F1...

Sans boussole, pour trouver la cavité une fois dans le pré, il n’y a qu’à suivre les petits surcreusements remplis d’eau qui parcourent le sol argileux, car ils convergent tous vers l’entrée de la cavité. Là, vous verrez -s’il pleut- un petit filet d’eau rentrer sous terre et disparaitre.

Mais qui sait parmi les promeneurs que l’eau qui rentre dans ce trou réapparait plusieurs kilomètres plus au Nord-Est, 200m plus bas, dans les gorges du Loup ? C’est tout un parcours souterrain que le spéléo aimerait parcourir dans son intégralité jusqu’à la rivière et qui explique en partie cet article et notre acharnement à trouver une suite à cette cavité ! Car en théorie, il n’y a qu’à suivre le fil de l’eau depuis le plateau pour arriver au Loup! Mais malheureusement, du fait de l’étroiture du réseau dès son début, cela ne tenait guère plus du rêve que d’autre chose.

Donc, cher(e) ami(e) lecteur(trice), que tu sois familier(e) aux termes du spéléo-géologue ou pas, un mini cours de géologie de base s’impose ; ne t’inquiète pas, je n’irai pas très loin, je ne tiens pas à t’endormir, nous sommes là pour nous divertir.

Des bases de géologie et de karstologie

Quand il pleut sur un plateau calcaire, l’eau a le choix ; soit elle s’écoule en surface (car le calcaire sain et non fracturé est imperméable par nature) soit elle s’infiltre sous terre (si le calcaire est parcouru d’un réseau de fissures). Et l’eau, qui se déplace sous la force de la gravité vers le bas (mais aussi à plus petite échelle sous l’action des forces de capillarité), après un parcours souterrain dans les microfissures puis dans l’aquifère ressort plusieurs centaines de mètres plus bas, au niveau des sources. Ces dernières se répartissent dans les vallées creusées (voire surcreusées) aux termes des oscillations du niveau de la mer au cours des temps géologiques et dans lesquelles serpentent des rivières locales comme la Cagne, le Loup, la Brague...

A titre d’exemples régionaux, on citera les sources de Bramafan (672m plus bas que l’entrée de l’eau à l’embut de Caussols), de la Pare, de la Petite Bouisse, du Fugeret, de Maupas, des Noyers, du Lauron, de Béget, du Figueret (641m plus bas que l’aven Fourchu), de Bois Fleuri…L’eau -en plus d’alimenter ces sources situées au-dessus ou dans la rivière- vient alimenter l’aquifère qui est en relation avec la rivière sous ses berges via les alluvions (les sources jouant alors le rôle de trop plein). Ces sources peuvent être captées pour les besoins humains ou pas, en fonction de leur débit et de leur utilité potentielle pour les villes et villages des environs (le Riou de la Cagne, la Foux de Vence qui sort dans le vallon de la Lubiane, le Noyer dans le Loup…).

Mais il peut arriver que l’eau de pluie qui s’écoule en surface du plateau s’infiltre entièrement dans ce plateau grâce à une cavité (elle aussi creusée au dépend d’une fissure mais là c’est une autre histoire). Cette cavité, dite active, s’appelle alors dans notre région un embut ou ponor, ou bien une perte (si pas pénétrable par l’Homo-Speleus) ; elle est située dans un point bas du plateau qui a alors topographiquement parlant une forme de cuvette ou polje ; elle récupère l’eau par gravité qui s’écoule du point haut du bassin versant vers le point bas (Figures 1, 2 et 3). Dans la littérature scientifique, les termes ponor (perte) et polje (cuvette) proviennent du Slave et ont été pris comme références. Pour clore cette parenthèse culturelle, le mot Karst qui décrit une région calcaire vient aussi de cette même région (ex-Yougoslavie). Tous les paysages qui nous entourent ici sur la côte, dès le moment où du calcaire entre en jeux peuvent être appelés paysages karstiques, avec des formes particulières d’érosion ou autres (le 'village-nègre' sur le plateau de Saint-Barnabé en est un exemple typique).

Figure 1: un exemple de polje et de son ponor: la plaine de Caussols et son embut (vue de Calern) 

Figure 2: la route de Caussols sous l'eau, l'embut est saturé (mais continue d'absorber de l'eau)!

Figure 3: l'embut de Caussols, vu de l'intérieur à l'étiage (érosion visible du calcaire due au passage de l'eau)

C’est à ce titre que l’aquifère karstique (en milieu calcaire) est un aquifère excessivement vulnérable en termes de pollution car la moindre bactérie nocive ou produit polluant versé sur le plateau (citerne d’essence d’une station-service, citerne de fioul d’un particulier, camion-citerne accidenté sur le bas-côté de la route, décharge publique mal calculée, cimetière) peut se retrouver en quelques heures sous le plateau puis ensuite dans la jolie rivière en contrebas et polluer ainsi un potentiel captage dont je parle plus haut…Ce type d’aquifère n’a pas ou très peu de potentiel filtrant.

Et dans notre région ?

Pour en revenir à notre embut, c’est un terme connu dans notre région car sur le plateau de Caussols se trouve le fameux embut de Caussols dont je parle plus haut. Cette cavité recueille les eaux de ruissellement arrivant de l’Ouest, de l’Est, du Nord et du Sud du plateau de Caussols. Le spectacle après de fortes précipitations peut y être étonnant et magnifique : la vision d’un lac éphémère en plein milieu de la montagne, coupant la route, avec panneaux de signalisation dépassant de l’eau.

Et le point d’absorption qui avale toute l’eau -au moins 4m3 par seconde- c’est ce fameux embut de Caussols (Figures 1, 2 et 3). Concrètement parlant, cette cavité se présente sous la forme d'une galerie qui s’est créée sur un réseau de fissures de directions différentes, avec quelques petites cascades qui agrémentent son parcours et qui descend jusqu’à un siphon peu engageant vers -25m. L’eau qui y est avalée ressort dans la vallée du Loup à Bramafan. Mais toute similitude avec notre embut du Débram s’arrête là (si ce n’est l’étymologie quelque peu semblable mais la toponymie semble différente). Chaque embut est particulier de par son appartenance à des systèmes hydrogéologiques et géologiques différents. Le principe est cependant le même. Quant à retrouver le pré des Bertrands inondé sous 2 mètres d’eau, de mémoire de spéléo contemporain, nous ne l’avons jamais vu, même lors d’épisodes pluvieux très intenses (mais peut-être qu’en interrogeant un ‘vieux’ du coin, il pourrait nous affirmer le contraire).

On trouve d’autres embuts bien plus connus dans notre région, dont certain relativement profonds : embuts de Caille, de Rouaine, de Gréolières les neiges, de Thorenc, de Ville-Bruc, de la Pinée… Le point commun de toutes ces cavités est qu’elles absorbent l’eau qui coule en surface, qu’elles se mettent toutes en charge sur des hauteurs parfois impressionnantes et qu’elles restituent l’eau dans la vallée. Les pertes à l’inverse sont des points d’absorption de l’eau mais dans un lit de rivière via des fissures très étroites, entre des blocs ou dans du gravier ou du sable ; et le spéléo ne peut pas rentrer sous terre par là à moins d’entreprendre une désobstruction mécanique de parfois longue haleine.

 

Figure 4: puits d'entrée du Débram (parois usées par le passage de l’eau)
 
 
 
Figure 5 : concrétion et sa goutte d'eau (largeur réelle, environ 8mm)

Voilà, j’en ai fini avec les gros mots ! Pour ceux qui n’aiment pas lire, un film a été réalisé par Jérôme notre poète-cinéaste lors d’une visite de la cavité par les membres du club ; le lien se trouve à la fin de l’article. De même, une coloration a été faite à l’embut par le bureau d’étude hydrogéologiques H2EA et le lien de la vidéo de cette coloration se trouve aussi en fin d’article (à ce jour, je ne connais pas le résultat définitif).

Figure 6 : petite salle située sous l’entrée (entrée derrière Alexis)

 

Figure  7: le haut du ressaut de 4m après la petite salle

Quelques rappels.

La quasi-totalité des terrains situés sur le karst de Roquefort est privée. Donc avant d’entreprendre un chantier de désobstruction d’une cavité, il convient de demander au propriétaire du terrain l’autorisation d’y travailler. Merci donc, Messieurs V. de nous avoir autorisés à travailler sur votre terrain.  

Pour les non-initiés, quand je parle ici de désobstruction, j’entends par là ouvrir une cavité naturelle non pénétrable - grotte ou aven- par divers procédés de manière à ce que le spéléo puisse y pénétrer et l’explorer. Quand la massette et le burin ne suffisent plus, on utilise en toute légalité (puisque nous sommes brevetés artificiers) des procédés pyrotechniques. Le terme « calibrer » a la même connotation car quand le passage naturel est trop étroit, on procède alors à un ‘calibrage’ qui vise à rendre le passage moins contraignant, surtout si le spéléo est appelé à passer par là des dizaines de fois…

Quant au terme ‘traçage’, c’est un procédé scientifique qui permet de mettre physiquement en évidence une liaison entre le point d’entrée (d’absorption) de l’eau sous terre dans un embut ou toute autre cavité non pénétrable par le spéléo et son point de sortie à la source. Pour cela, on ajoute à l’eau qui rentre dans la cavité un produit chimique (inoffensif pour l’environnement, en général un colorant alimentaire, voire du sel) et on tente de retrouver sa trace à la source via des capteurs électronique ou électrochimique. Ce procédé peut parfois être impressionnant car on peut injecter de grosses quantités de colorant (quelques kilogrammes à plusieurs dizaines de kilogrammes en fonction du débit) et l’eau peut ainsi être colorée en rose ou vert vifs…L’interprétation de ce traçage permet d’estimer le temps de transit sous terre, la vitesse moyenne, éventuellement un gradient, des divergences…Cela ne marche pas à tous les coups mais quand on peut, cela vaut la peine d’essayer.

De plus, s’aventurer dans cette cavité nécessite une bonne connaissance du milieu souterrain ainsi qu’une bonne assurance en cas de pépin : ne pas hésiter à contacter un des membres de notre club si vous désirez une visite complète, détaillée et gratuite (car nous y travaillons toujours) ; d’autre part, il est très important de se renseigner sur la météo car en cas de grosses précipitations, l’eau entre dans la cavité et peut la noyer intégralement. Ne vous y aventurez surtout pas par temps pluvieux continu car les risques de noyade et de mort sont quasiment assurés.

De même pendant des précipitations, n’y rentrez pas. Elles peuvent augmenter démesurément, de manière à mettre le réseau souterrain en charge. Nous ne savons pas quelles sont les parties du réseau qui pourraient être au sec lors d’une crue, donc dans le doute abstenez-vous. Des témoins de mise en charge nous ont montrés que ça ‘bastonne’ à l’intérieur d’autant plus que nous n’avons pas entièrement compris le fonctionnement hydrologique de cette cavité et que des arrivées d’eaux inconnues peuvent participer à augmenter le débit en fond de cavité.

Historique de la cavité.

La topographie qui a été faite par Yvon Creach dans les années 70 puis reprise lors d’un stage topographie par le Comité Départemental de Spéléologie du 06 en 2000- donne un développement de 50m (maximum en comptant les petites branches remontantes) et une profondeur de -15m. On trouvera ci-dessous des vues en coupe, en plan et diverses sections de la cavité dessinées par Eric Couillerot suite à la réouverture de la cavité en 1992 (donc avant le stage topo mentionné ci-dessus). Si vous êtes spéléo, la topographie de la cavité à jour faite par le GSV en 2021 sera publiée dans le bulletin du Comité Départemental de Spéléologie du 06 de décembre prochain.

Figure 8a : vue en coupe de l'embut (E. Couillerot)



La découverte de la cavité date de 1969 par le Spéléo Club de Roquefort mais le fait que de l'eau y disparait est surement connu depuis bien longtemps par les habitants car Roquefort est un lieu dont l’occupation traverse la Préhistoire et l’Histoire. On y trouve des grottes renfermant des sépultures de l’Age du Bronze et en surface, on ne compte pas les vestiges Celto-Ligures, les vestiges d’oppidums Romains sans compter un vieux village médiéval…bref de quoi passer une vie entière de découvertes. Il existe sur Roquefort pour ceux et celles intéressé(e)s des associations traitant de tout cela.

Puis la cavité a été rebouchée (Figure 4, l'entrée, une fois débouchée) dans les années 70-80 soit de manière naturelle, par la succession de crues annuelles, soit par un berger du coin qui avait peur pour ses bêtes.  Ensuite, le spéléo club de Cagnes sur Mer rouvre l’embut en 1992 sur l’initiative d’Éric Couillerot, alors Président de ce club. Son père, Paul, lui-même spéléo et ayant fait ses armes sur ce karst avant-guerre lui en avait parlé à l’époque, en évoquant une éventuelle liaison de l’embut avec la source du Lauron ou du Noyer, un peu en amont du captage dans le Loup. Donc un soir d’avril 1992, Eric, Daniel Mercadier et Christophe Salti enlèvent un "bouchon" naturel fait de blocs, d’argile, de feuilles mortes et de branches qui bouchent l’entrée et visitent la cavité.

Lors de cette visite nocturne, Eric, Daniel et moi avons pu nous rendre compte de son étroitesse et que ses possibilités de continuations étaient quasi nulle avec nos moyens limités de l’époque (à savoir un burin, une massette et de l’huile de coude; figures 5 à 7): soit on pouvait s’attaquer à un boyau de 30cm de diamètre dans le calcaire massif (Figure 11) qui partait droit sur 1,5m puis qui faisait un angle droit à gauche) ; soit on s’attaquait à un puits au départ très étroit, arrosé, de 2m de haut finissant en boyau étroit siphonnant (Figure 12). L’impression que nous a donnés de la visite de cette cavité est celle d’un cheminement étroit et pénible où on ne fait que passer de la position debout dans les ressauts à la position allongée dans le reste de la cavité !

Nous sommes remontés en surface le moral dans les chaussettes, nous disant qu’armés que de notre bonne volonté, le travail pour ouvrir la suite s’avérait impossible. Eric a quand même fait un croquis d'exploration, s'aidant des mesures faites lors de notre sortie (Figures 8a, 8b et 8c). Puis nous avons décidé de nous changer les esprits en allant travailler au fond de l’Aven de la Malle. L’embut du F1 et sa jonction avec la grotte du Lauron et autres résurgences dans la vallée du Loup étaient alors passés aux oubliettes….

Fin décembre 1999, plusieurs spéléo des environs (Daniel Cavani, François Santoro, Benjamin et Denis Faccia) sont redescendus jusqu’à -8m pour ‘voir’ par où commencer à déblayer. Ils s’arrêtent alors sur le méandre étroit, terminus de la cavité. Courant janvier et février 2000, deux autres séances ont lieu (Daniel, Denis et Benjamin) ; ils prennent quelques photos et commencent à élargir certains passages étroits ; ils s’arrêtent sur le ressaut terminal de 2m -le terminus d’alors où je suis resté bloqué en 1992. Le trou aspire. Une dernière séance a lieu (juin 2000) pendant laquelle on élargit le départ du ressaut de 2m, plutôt étroit pour les grands gabarits avec des pectoraux développés.

De l’eau avait donc coulé sous les ponts (et dans la cavité), chacun vacant à ses occupations. Aucune séance n’a eu lieu depuis 2000 car Dada avait d’autres chantiers dans d’autres cavités et mes obligations professionnelles ont fait que je n’avais guère le loisir de descendre sous terre. Donc 8 ans plus tard la dernière séance, fin 2008, je fais une petite séance désob avec mon vieux pote Alexis pour inaugurer mon certificat de préposé aux tirs fraichement acquis. Zaz et moi élargissons le passage à la base du 2ème ressaut de 4m (le 2e passage de la cavité où on doit s’allonger dans à l’égyptienne dans un peu d’eau et de boue). On en profite aussi pour faire quelques photos.

Puis l’idée m’est revenu de proposer à Daniel Cavani vers la fin des années 2000 de nous remettre sur cette cavité. J’avais alors pris ma carte au Groupe Spéléologique de Vence (GSV). Mon vieil ami Eric ayant quitté la région, j’étais garant de ce projet qui a hanté l’esprit de 3 générations de spéléos ! Je ne vais pas dire que cela m’empêchait de dormir mais l’énigme qui planait autour de ce réseau hypothétique sous le plateau de Roquefort continuait à « me » travailler, tant d’un point de vue spéléologique que d’un point de vue géologique et hydrogéologique. La réputation de Dada dans le domaine de la désobstruction nous était parvenue (avant même d’avoir pu m’en rendre compte lors de toutes les séances faites avec lui dans les années qui ont suivi ; pour avoir un exemple, lisez le compte rendu qui a été fait de la découverte de la grotte des « 3 mille pattes », en octobre 2016 dans ce même blog). Et c’est une proposition donc un peu intéressée que je lui ai faite alors !

Le début de la désobstruction de l’embut.

La 2ème reprise de la désobstruction date d’août 2012 à l’initiative de Christophe -maintenant membre du GSV- et conscient du potentiel de la cavité, qui a poussé Daniel alias « Dada » à ouvrir le chantier.

 

Figure 8b : vue en plan de l’embut (E. Couillerot)


Figure 8c : plusieurs sections de galerie de l'embut (E. Couillerot)


Digression nécessaire sur la grotte-résurgence du Lauron


A l’époque, avec Eric, nous nous intéressions aussi au réseau du Lauron. Nous savions qu’à la fin des années 60 début 70, un embut s’était ouvert dans le lit de la Miagne (une rivière temporaire qui coule au Nord de Roquefort) suite à des grosses pluies. Le spéléologue référant de Roquefort à l’époque -Robert Faivre- avait alors été appelé pour aller jeter un coup d’œil dedans (Figure 9). Il n’a pas pu s’aventurer trop loin compte tenu des embruns mais a quand même pu distinguer l’existence d’un réseau se dirigeant en gros sous la Miagne, partant vers l’Est.

Un traçage a été effectué le 15 Janvier 1970 par Christian Mangan, un géologue bien connu dans la région, avec l’injection de 5kg de fluorescéine dans cet embut dans lequel l’eau de la Miagne rentrait avec un débit d’environs 200 litres par seconde. Entre 45 heures et 60 heures plus tard, le traceur a été mesuré dans l’eau sortant de la résurgence du Lauron, puis à la source des Noyers et à la source Merle. Tout cela prouve que l’eau de la Miagne qui s’infiltrait sous terre au niveau du plateau ressortait dans 3 sources différentes dans la vallée des gorges du Loup (dont une en relation directe avec l’aquifère, la source Merle). Suite à cela, l’embut a été rebouché par la voirie de Roquefort car sa situation représentait trop de danger, une voiture ou un promeneur pouvant être entrainé dedans avec les conséquences envisagées.

Figure 9 : l'embut de la Miagne qui s’est ouvert dans le lit de la rivière en 1970 (R. Faivre)

Le Lauron est un captage (forage) situé dans le lit du Loup en rive gauche. La grotte résurgence éponyme est une cavité connue depuis longtemps, située en rive droite, à 150m de ce captage. Quand il pleut, l’accès à la grotte est barré par une belle cascade et l’entrée siphonne immédiatement. La progression y est aisée sur une centaine de mètres puis on butte sur un siphon. Début 1990, le Spéléo Club de Cagnes sur Mer y a fait de la première malheureusement non topographiée : nous avions alors fait une escalade dans la 1ère salle avant le siphon-1. C’est une belle cheminée située au-dessus de la plage où nous nous étions approchés de la surface et d’une entrée supérieure non répertorié (et non passable sauf à faire du déblayage), entre 15 et 20m au-dessus du sable blanc). Et ensuite, à la faveur d’un fort étiage estival, nous avions franchi le siphon 1, puis escaladé un superbe toboggan de boue, trouvé une salle remplie de blocs et nous nous étions finalement arrêtés devant le siphon 2, dans une jolie galerie bien propre, d’au moins 2m de diamètre. Par manque de temps, nous n’avons pas pu faire de topo ; ce sont deux plongeurs du cru (Thierry Saint-Dizier -malheureusement disparu depuis- et Jean-Claude Tardy de l’Abîme Club de Grasse en 1993) qui ont refranchi le siphon 1, franchi les siphons 2, 3 et butté sur le 4 (étroit). Ils ont alors levé la topographie de leur découverte. Ils ont trouvé par la même occasion des traces de notre passage (corde dans la montée au-dessus du siphon 1 puis un bidon étanche dans le haut de la salle Magalie, ainsi que les initiales de notre club gravés sur le dessus du siphon). Tout le mérite leur revient, ils ont fait en combinaison de plongée avec des bouteilles de 12 litres sur le dos ce que nous avions galéré à faire en tenue de simples spéléos…Et ont poussé plus loin encore leur exploration que nous. Un article de Spélunca retrace leur épopée.

Géologie

Mais je divague, je divague…Revenons à notre embut du Débram ! Celui-là ne s’est formé ni par effondrement ni n’a été rebouché par la voirie mais soit par un berger qui avait peur de voir ses bêtes tomber dedans, ou tout simplement par la nature elle-même.

D’un point de vue géologique, pour les puristes, l’entrée de la cavité (Fig.2, le ressaut d’entrée dont le calcaire est poli par l’eau et Fig.3, la petite salle se trouvant sous le ressaut, Alexis donne l’échelle) se trouve dans les calcaires marmoréens du Portlandien-Berriasien J7-n1. Plus bas dans la cavité -et dans la série- donc plus profond -et plus ancien-, on trouve le Jurassique dolomitique JD. La nomenclature provient de la réédition de la carte Cannes Grasse BRGM 2010. Se reporter à la coupe géologique (Figure 10b) ainsi qu’à sa localisation sur la carte (Fig. 29, 50 et 51). Du point de vue de la géologie structurale régionale, nous nous trouvons dans l’autochtone provençal qui à l’inverse du reste de la région située plus au Nord (la Malle, Caussols, Calern, l’Audibergue) provient du dépôt de sédiment ayant été faits sur place à une époque très lointaine où la mer occupait la région (au Jurassique Moyen). Le reste est de l’allochtone (littéralement 'qui vient d’ailleurs'; voir Figure 10a, une coupe géologique N-S en partant du Baou des Blancs vers le ball-trap sous le col de Vence; légende en figure 58).

Figure 10a : coupe géologique mettant en évidence le chevauchement du Jurassique (allochtone) sur l'autochtone provençal; légende ci-dessous (C.Salti)


Plus précisément, la partie Nord du département dont je parle plus haut a subi un déplacement de plusieurs dizaines de kilomètres lors de la surrection des Alpes, ainsi qu’un raccourcissement pluri-kilométrique (une quinzaine de km). Toute la géographie au Nord d’une ligne (pas très droite) allant de Carros en passant par la Gaude, Saint-Jeannet, Vence, Tourrettes-sur-Loup, Grasse) est la conséquence de cette géologie :

- la ligne des Baous entre Vence et la Gaude (où du Jurassique repose anormalement sur du Miocène)

-la succession de grands plateaux monoclinaux à pendage vers le N (en moyenne), surmontés de petites falaises (où le Jurassique repose anormalement sur du Crétacé) de la Malle, Caussols, Calern, l’Audibergue...

On n’oubliera pas non plus toutes les sources qui parsèment nos belles rivières régionales (le Loup, la Cagnes, la Brague, la Siagne) et qui sourdent au profit de gros accidents tectoniques (les failles).

Figure 10b : coupe géologique montrant le monoclinal -pendage faible vers l’Est- de l’autochtone provençal; légende ci-dessous (C.Salti)

Concernant ‘notre’ Débram, un traçage montrerait que lui aussi est en communication avec au moins la grotte du Lauron (je dis montrerait car la biblio n’est pas claire là-dessus ; un traçage a été fait dans 'un' embut des Terres Blanches sans nommer le Debram donc on ne sait pas s'il s'agit de la même cavité ou pas, sachant que sur Roquefort, plusieurs cavités peuvent avaler de l'eau). Donc la boucle serait bouclée, il n’y aurait qu’à creuser là pour sortir dans le lit du Loup, 3km plus à l’Est. Facile, non ? Oui, surement facile avec un tunnelier ou avec une quantité illimitée de produits détonants et de détonateurs, avec beaucoup de temps et de patience aussi. 

A noter qu'il existe deux cavités inventoriées sur la plateau de Roquefort qui se trouvent sur le trajet hypothétique du réseau liant le F1 au Lauron (pas encore notées sur les figures 29 et 30 mais je le ferai à l'avenir): la grotte de la Chèvre d'Or et l'aven Roger. La 1ere est une grotte très connue du plateau sur toutes les cartes IGN; c'est une ancienne rivière souterraine, peu concrétionnée mais intéressante d'un point de vue géologique car montrant la taille des galeries dans lesquelles la paléo-rivière il y a très longtemps. Il serait très intéressant d'y faire des travaux de désobstruction, que ce soit au bout de la galerie bouchée par un siphon colmaté (dans ce cas on irait en direction du F1) ou bien dans le diverticule terminant par un petit puits étroit. Autre possibilité: dégager l'effondrement sous l'entrée de la grotte car la galerie semble continuer en direction ... du Lauron, situé plusieurs dizaines de mètres en contrebas. Donc au choix, depuis cette grotte, on aurait accès soit à l'aval du réseau vers le Lauron soit à l'amont vers le F1. Quant à l'aven Roger, il s'agit d'un puits unique large de 2m, situé au pied d'une petite barre au NE de la grotte précédente et dans lequel notre club a creusé il y a quelques années, faisant passer la profondeur de 3-4 mètres à plus d'une dizaine de mètres; l'humidité allait en augmentant avec la profondeur. Le fond est constitué de blocs de tailles variées, d'argiles, d'ossements divers car ce puits servait surement de "poubelle" aux habitants du village médiéval situé en face sous le Castellaras. Nous y avons arrêté les travaux par manque de main d'œuvre mais la jonction avec le Lauron est plausible car sur la topographie levée par les deux plongeurs à l'époque, une suite vers le haut est visible et située à peu de distance en plan de l'aven... A vos pelles, pioches et brouettes!!   

Figure 10c: légende de la coupe géologique du Baou et de Roquefort

L’embut : enfin l’ouverture du chantier !

En août 2012, Daniel Cavani (Dada) et Christophe Salti vont au terminus connu et topographié pour décider où entamer les travaux. Nous avons 2 options pour la suite :

1/ désobstruer après le ressaut de 2m dans l’actif (R2), là où se perd l’eau (Figure 12);

2/ agrandir et continuer le boyau de 40cm de diamètre qui part à l’horizontale puis qui a l’air de bifurquer sur la gauche, là où Eric 'fil de fer' avait avancé avant de butter sur vraiment impénétrable (Figure 11).

A l’époque, arriver jusque-là était ardu car le cheminement n’avait quasiment jamais été calibré. Après une courte réflexion, la décision est prise : on va tout droit, on attaque le boyau.

Figure 11 : tout droit (le gant donne l’échelle) ? 

Figure 12 : ou bien en bas dans la perte (Ressaut de 2m) ?

Cependant, avant de songer à aller plus avant dans la cavité, il faut tout recalibrer depuis l’entrée jusqu’ici car, primo, l’accès au chantier serait malaisé et secundo, l’évacuation des déblais serait impossible du fait de l’étroitesse du méandre terminal (Figures 13, 14 et 15). Car qui dit « désobstruction » dit aussi gravats à sortir. Quand on casse de la roche à un endroit donné, il faut transporter ailleurs les petits blocs et les gravillons à un autre lieu de stockage à l'aide d'un bidon évidé. Ce sont les joies de la désobstruction que de ramper en reculant dans un méandre étroit, humide, en poussant ou tirant des bidons ou des sceaux. C’est la raison pour laquelle cette activité particulière de la spéléo attire aussi peu les volontaires, même si la récompense peut être à hauteur des efforts fournis. C’est parfois ingrat, mais ça paye. On le sait au GSV, avec les 3 Mille Pattes et autres cavités découvertes et explorées par nos soins.

Ainsi, entre octobre 2012 et août 2013, il faut 6 séances de calibrage pour rendre la cavité « praticable ». Ensuite, entre août et novembre 2013, plusieurs séances ont lieu à la fois pour élargir la partie basse du méandre située avant le ressaut (pour faciliter le passage des gros bidons à gravats) et pour avancer dans le boyau terminal et le calibrer. Les déblais sont disposés une dizaine de mètres en amont dans une haute salle (une paléo-entrée rebouchée située sous un gros tumulus en surface). Le 1er coude à gauche franchi dans le boyau terminal, on arrive maintenant à tenir quasi assis.

Florian Luciano se joint à l’équipe et continue de pousser les bidons depuis le boyau jusqu’à la salle en amont, via le méandre.

Lors de chaque sortie, on en profite pour améliorer chaque passage pénible soit en élargissant soit en posant des barreaux (exemple dans le 1er ressaut de 4 m).

En décembre 2013, un autre invité se joint maintenant à l’équipe. Il s’agit de Frédéric Péan qui a souvent travaillé sur la Baume Robert avec Christian Verducci (voir en fin d'article l'adresse du Blog de Christian récemment récupéré par le CDS06 suite à sa disparition).

Figure 13 : la base du R3

Figure 14 : le départ en boyau du méandre

Figure 15: le méandre en cours d'élargissement

      Lors de chaque sortie, on en profite pour améliorer chaque passage pénible soit en élargissant soit en posant des barreaux (exemple dans le 1er ressaut de 4m).

    Entre janvier et février 2014, Dada effectue seul plusieurs séances de déblayage/calibrage entre l’entrée et le R2 où se perd l’actif sans toucher au boyau terminal. Puis en mars 2014, il revient avec Frédéric pour finir de déblayer et continuer d’avancer dans le boyau. Nous sommes maintenant à 13,5 m dans le boyau, depuis le R2. La salle où l’on entasse les gravats est maintenant pleine et on remplit les moindres anfractuosités sur le parcours vers la sortie. 


Figure 16 : les 3 premiers mètres du boyau...étroits!

Entre le 14 mars et le 7 avril 2014, lors des 4 séances suivantes on élargit le boyau dont les dimensions augmentent malgré tout plus on avance. Au bout de ce boyau, une forte résonance se fait entendre quand on crie, suivi d’un bruit de chute de plusieurs mètres quand on envoie un caillou dans la suite impénétrable. C’est bon signe ! Mais le fond temporaire du boyau, horizontal, est une vasque remplie d’eau. Avant de songer à avancer, il faut penser au confort et évacuer cette petite mare. La suite se paie cher.

C’est le 16 avril, après 3 séances supplémentaires, qu’on peut avancer la tête en se contorsionnant pour arriver à voir d’un œil la base du puits. Ça fait à vue de nez 4-5 m de long, 5 m plus bas. Il semble qu’on intercepte un méandre par le haut. A la séance suivante, en se contorsionnant dans le boyau pour passer cul par-dessus tête afin de pousser les derniers gravats du bout de la botte, on peut enfin descendre le puits/ressaut de 4,5 m de haut, un peu en opposition, un peu en désescalade (Figures 17 et 18). Une échelle souple est posée temporairement pour aider (échelle qui cassera sous mon poids plume; heureux alors de m'être assuré à la petite main courante). La base du puits qui s'est remplie de gravats mesure 4m de long par 2m de large. Une belle coulée de calcite avec une jolie vasque à la base bouche l'amont avec cependant une suite visible au-dessus, en méandre, mais très étroite. Vers l’aval, le beau et haut méandre continue (Figures 19 et 20).

 

Figure 17: le ressaut de 4m vu d'en bas


Figure 18: le ressaut de 4m vu d'en haut

Il aura fallu en tout 28 séances depuis la reprise des travaux pour arriver là. Passés les émois de la première, on reprend la massette et le burin pour élargir un peu l’aval ; on casse un pont de calcite qui barrait le méandre et nous avançons de 3m dans ce méandre de taille normale. Ce méandre, on ne le quittera en fait plus jusqu’au fond. Dans les cavités, il arrive très souvent qu'on suive un méandre dés le début, puis que ce dernier s'approfondisse au fur et à mesure qu'on progresse vers l'aval, nous trouvant tantôt en haut du méandre, à ramper dans le "trou de serrure" s'il existe, tantôt à la base de ce méandre, à patauger dans de l'eau s'il est actif! Ici, dans l'embut, c'est le cas.

Ce jour-là, on avance de 6m dans le méandre en bas du puits. C’est en tout une progression de quasiment de 9m que l’on fait dans l’aval -par rapport à la base du puits- dans un méandre entrecoupé d’une petite salle, avec le passage de l’eau au sol. On s’arrête sur un ressaut de 1m, très étroit, avec un coude sur la droite donnant sur une petite salle aveugle remplie de petites concrétions.

Le 28 avril, Dada revient une fois de plus pour calibrer tous les passages étroits sans aller plus avant. Le 2 mai, Dada et Fred reviennent et améliorent la fin du 1er méandre (celui de la partie connue et topographiée), puis élargissent le début du boyau qui reste cependant difficile à passer. Le départ et le coude à gauche immédiatement après le R2 ne sont pas aisés à passer en ramping avec un kit rempli d’un perforateur et de batteries, de mèches, masse, burin, le casque sur la tête. Pour le boyau, chacun fait comme il le sent : les plus petits rentrent tête en avant en poussant le kit et se retournent 4m plus loin. Les plus grands font demi-tour sur le R2 et rentrent dans le boyau les pieds devant, en tirant le kit derrière eux. Et manier le perfo à bout de bras pour trouver des aspérités pour que la mèche accroche bien n’est pas chose facile, surtout dans un passage qui fait moins de 40cm de diamètre, dans de la dolomie.

Après ce début de séance à élargir le début du réseau, l’équipée descend le R4 et continue sa première : dans l’aval entrevu précédemment, ils repassent alors le R1 et avancent 5 m de plus. Mais la suite est impénétrable. Ils se rabattent alors sur un petit passage entrevu au sol à gauche par lequel l’eau semble passer. Bingo ! Ça passe. Ils arrivent à faire une dizaine de mètres en première dans ce méandre qui continue de s’approfondir sous leurs pieds. Mais ce n’est pas passable sans tirer la paroi. Lors de la séance suivante, Dada revient seul travailler sur la fin du 1er méandre et le départ du boyau de 17 m. Ce travail est vraiment indispensable pour faciliter l’accès à l’aval, éviter la galère pour qui veut aller bosser au fond.

Figure 19: suite à ouvrir vers l'aval

Figure 20: la sortie du ressaut de 1m (pas haute mais bien étroite)


  Le 7 mai, Dada, Fred et Florian élargissent le passage et descendent un R4 (Figure 21, le haut du méandre) qui donne dans une salle d’une dizaine de mètres de long, 4-5 m de large, haute d’un peu plus de 10 m, mais peu concrétionnée. Un dernier R2 permet de prendre pieds dans la salle Grimbergen (Figure 22, du nom des bouteilles laissées par Fred pour nous abreuver), peu concrétionnée, peu humide). Au sol se trouve une étroiture qui donne sur le passage de l’eau. Un tir permet d’élargir le passage et on retrouve ensuite le méandre. Cette fois-ci, c’est à sa base que l’on progresse et non plus dans le haut. On est à 4 pattes. On avance 4 m de plus avant de buter sur une étroiture. Les dimensions du passage sont vraiment restreintes par rapport à ce que l’on a rencontré plus haut. Le passage est humide, bas et étroit (moins de 1 m). 

 

Figure 21: le Haut du Ressaut de 4m dans méandre   

Figure 22: Dada à la sortie du méandre à la base du R4 dans la salle Grimbergen

Le 12, 19, 30 mai et 25 juin, comme cela devient le rituel, Dada et Fred élargissent et équipent les passages nécessitant d’être revus. Une fois revenus dans le méandre/boyau, après plusieurs tirs, ils avancent d’abord de 4 m, mais c’est vraiment étroit. On voit une suite sur la gauche qui semble remonter (pas large, amont ?) et une autre suite (plus large) sur la droite, par laquelle l’eau semble sinuer au sol, l’aval ! Fred, plus fin que les autres, s’y faufile et fait 2 m de plus. Ce qu’il voit est étroit, mais ça continue (Figure 23).

Les 2, 4 et 8 juillet, Dada revient tantôt seul, tantôt avec Fred ou Christophe pour continuer de calibrer et de poser des barreaux pour aider à la progression. La suite de ce méandre est à nouveau vraiment très humide et étonnement propre. N’y aurait-il pas une arrivée d’eau quelque part ? Rien d’évident nous saute au nez. On entrevoit un R3 plus loin, mais cela ne sera pas pour ce coup ci.

 Ce n’est que le 12 juillet après plusieurs tirs qu’on réussit à passer ce R3 de haut, en dévers, parsemé de gours remplis (Figure 24: Fred en train de remonter). C’est la 50ième séance ! Nous n’avons pas compté combien de mètres de premières ont été faits depuis le terminus connu et topographié, mais en écrivant 60-70 m, nous ne sommes pas loin de la réalité. Cependant, ramené au nombre de tirs, le mètre de première revient cher. Ce R3 arrive dans une salle plus longue et haute que large (Figure 25: Daniel au fond de la salle suspendue). C’est toujours ce méandre qu’on suit et qui s’approfondit au fur et à mesure qu’on avance.

Au sol, à 3 m de la base du ressaut par lequel on est descendu, le méandre continue vers le bas. Ce n’est pas très large, la roche semble un peu déchiquetée et ça ne passera pas aujourd’hui. La suite se trouve 4-5 m plus bas, sous forme d’une vasque, mais le passage demanderait quelques coups de massette. Plus en hauteur, le méandre continue dans le noir. Il faudrait là aussi escalader pour voir s’il n’existe pas une salle plus haut.

 

Figure 23: boyau en cours d’élargissement peu avant l’arrivée de l’actif


Figure 24: base du ressaut de 3m menant à la salle suspendue


Figure 25: Vue vers le fond de la salle suspendue

Le 14 juillet, faisant fi de la fête nationale, Dada revient, élargit le passage puis désescalade la verticale dans le méandre (6 m de haut). La suite est encore plus étroite que prévu mais donne sur un autre P3. Il ne peut pas l’ouvrir ce coup-ci, ce n’est que partie remise quand il revient la fois suivante accompagné de Fred. Ils calibrent tous les passages ennuyeux et posent des broches en tête du terminus précédent. Un dernier tir et le puits est franchi. Ils atterrissent dans une salle quasi circulaire de 4 m par 3 m, de 5 m de haut où l’on peut voir quelques concrétions et dont le sol est maintenant envahi de déblais issus des travaux en amont (Figure 26, la base du puits). Il y a visiblement une arrivée d’eau venant du plafond en plus de celle par laquelle nous arrivons. Au sol, il y a un petit trou circulaire de 20 cm de diamètre dans lequel se trouve un peu d’eau. C’est décidé, cette mini perte nous servira de toilettes…

Figure 26: Base du puits dans la salle carrefour

 Sur la gauche de la salle, la suite se poursuit en forme de méandre dans lequel on progresse debout au début puis plié ensuite (Fig.27, Dada tournant le dos à l’aval). C’est boueux, long d’une dizaine de mètres. Un colmatage encombre le passage, nécessitant de passer par-dessus. On retrouve le sol 3 m plus loin, puis le plafond s’abaisse progressivement jusqu’à donner dans une mini galerie, tenant plus du laminoir dans lequel on progresse en rampant sur 5 m, le fond rempli d’eau. Puis le laminoir fait un coude à gauche (Fig.34) et au bout de 4 m, le passage termine en voûte mouillante, sur une baignoire peu engageante (Fig.28).

 

Figure 27 : départ du réseau horizontal (Daniel regarde l'amont)

 

Figure 28: la baignoire numéro 1 avant les travaux

Interlude chiffrée

Faisons une pause dans la progression et parlons chiffres. L’altitude de l’entrée de la cavité est 246 m (mesurée avec un GPS Garmin196). L’altitude approximative du sol de la salle où nous sommes arrivés est 193 m (cheminement au ‘DistoX2’). En tenant compte des erreurs de mesures, on peut estimer le dénivelé jusqu’à la salle à -54 m (soit 39 m verticaux de gagnés par rapport à la profondeur initiale de -15 m). L’altitude de l’entrée de la grotte résurgence du Lauron est 75 m.

Figure 29: carte topographique avec localisation de la coupe et du réseau du Débram (OpenStreetMap sous QGIS)


- sur la carte (Fig.29), on a repéré l’entrée de l’embut (lettre B) au sud des Terres Blanches. Son terminus (développement en vert clair qui montre que la cavité part vers le SSE) est reporté avec la lettre C. Puis la résurgence du Lauron, au Nord du plan, en rive droite de la rivière Loup (lettre F) et dont le développement en vert montre que la cavité se dirige vers le SW) ;

- sur le profil topographique (Fig.30), la surface du plateau est représentée en rouge et les reports topographiques des 2 cavités mentionnées plus haut sont en noir. Le Loup coule dans la vallée. A l’étiage, l’eau du S1 part dans un méandre impénétrable qui va directement dans le lit du Loup (petite flèche à main levée) et en crue, l’eau sort en cascadant. Le lettres (A, B, C, D, E et F) sont aussi reportées sur le plan précédent pour mieux se repérer. On a représenté les coupes développées approximatives de l’entrée de l’eau sur le plateau (Embut) et du point de résurgence (Grotte du Lauron) dans la vallée.

 Nous avons donc encore un dénivelé approximatif de 114 m pour arriver à l’altitude du Lauron. La distance restant à parcourir pour atteindre un hypothétique aval du Lauron quant à elle est de plus de 1500 m en ligne droite sur la carte (qu’il convient de majorer en réalité). En effet, en plan, même si la distance parcourue depuis l’entrée du F1 est de l’ordre de 300 m, nous avons tourné sous le champ en descendant, puis nous sommes partis vers SE, donc en s’éloignant de l’axe visé, à savoir le Lauron, situé au NE …

Figure 30: profil topographique avec localisation de la perte et de la résurgence


Fin de l’interlude, reprise des travaux !

Le 1er août 2014, Dada et Fred reviennent calibrer jusqu’au laminoir aquatique. Ils passent la baignoire qui n’est pas longue, mais dont le fond est très boueux. De l’autre côté, on se remet vite à 4 pattes, mais toujours dans l’eau et la boue. La suite se divise en deux :

→ en face, le conduit diminue en hauteur et largeur, mais ça continue sur au moins 4 m de long. Ça a l’air passable bien que boueux et peu engageant. C’est visiblement un autre amont que celui par lequel nous sommes arrivés. Peut-être que nous nous trouvons à un carrefour important de la cavité ?

→ à gauche, à l’inverse : ça s’élargit sous la forme d’une mini galerie elliptique qui a l’air d’aller en s’agrandissant. De plus, l’eau semble partir de ce côté quand il y a du débit (sinon, elle stagne là). C’est donc l’aval de l’actif. Les dimensions restent respectables (2 m de large par 1,5 m de haut). Il y a des galets au sol, du gravier, du sable, des grosses vasques. On est dans le collecteur local. Ça y est !

Figure 31: début du laminoir aquatique de 40m (avant calibrage)

Aussitôt découvert, on s’engage dans le plus facile et le plus accueillant ! Au bout d’une quinzaine de mètres, le conduit gagne en hauteur. On peut maintenant tenir quasiment debout. Une coulée bouche la galerie, mais, sur le côté gauche, on aperçoit une étroiture plus haute que large. C’est le passage de l’eau (Fig.31). Ça ne passera pas aujourd’hui. Derrière, cela semble continuer, suffisamment large, mais pas très haut et surtout très humide. Ce sera notre deuxième laminoir aquatique. Mais comme on le verra plus loin, il est bien plus long que le 1er mais plus esthétique (hein, Jérôme!).

A ce niveau de la progression dans la cavité, la zone de transition verticale (terme technique pour désigner la succession de puits et ressauts qui mène à une zone plus horizontale où coulerait le collecteur semi horizontal) semble terminée. Entre le niveau du sol de la salle précédente et la coulée bouchant le passage de l’actif, le dénivelé est de l’ordre de 1m pour une quarantaine de mètres d'avancés. Pente faible, longue distance quasi horizontale parcourue, nous sommes dans un collecteur. Certes, cela ne semble pas être le collecteur principal sous Roquefort. Nous sommes sûrement dans un paléo-collecteur ou collecteur suspendu qui collectait les eaux à une époque où le niveau de base était plus haut qu’actuellement. Et à la suite d’une baisse du niveau de base postérieure, il y a eu enfoncement du niveau d’un 'paléo' Loup et surcreusement des carbonates dans lequel ‘notre’ Débram se développe. Mais cela, nous ne pourrons nous en rendre compte qu'en passant la voûte mouillante terminale.

Ce dont nous sommes sûrs, c’est qu’une grande partie des eaux du plateau de Camptracier semble converger ici. Le reste des eaux de surface qui part vers le Nord (vers le vallon de la Miagne) coule soit en surface pour rejoindre ce ruisseau temporaire de la Miagne, soit s’infiltre dans certains points d’absorption.

Revenons en arrière, dans notre journée du 1er août, jusqu’à la précédente bifurcation. On s’enfile à gauche dans le laminoir boueux qui partait en rétrécissant, vers ce qui semble être un 2ième amont inconnu. C’est étroit, c’est boueux à souhait. Une arrivée d’eau vient du plafond sur la gauche, mais c’est impénétrable. Puis le laminoir bifurque à angle droit sur la droite. Il devient plus propre, a une jolie forme elliptique (80 cm de large par 30-40 cm de haut) avec des petits cailloux arrondis au sol.

Encore 4m à faire en rampant sur le ventre dans cet environnement étroit. Il faut rentrer les poumons et... enfin debout (Figure 32).

Figure 32: sortie du boyau donnant dans la salle de la RemonDada

On déboule dans un gros volume qui va en grossissant quand on avance. Au sol, des galets, de la boue, des traces d’un petit ruisseau. Nous progressons dans un méandre de 2 m de large et de plus de 8 m de haut au début. Nous arrivons dans une Salle de la RemonDada quasi circulaire, plus haute -22m- que large (Fig.40, 53 à 56, Frederic se trouvant au milieu des gours ; en fond la galerie d’accès ; en fond la galerie d’accès ; 8’30 dans le film pour la Salle de la RemonDada, puis à la 11eme minute, on voit la sortie du boyau). De jolis gours actifs tapissent le sol, avec des petites perles dans leur fond (Fig. Ondine servant de modèle à Florian dans la Salle de la RemonDada). De l’eau goutte en abondance du plafond. Les parois sont verticales, il semble qu’on soit arrivés au terminus de ce côté-là. L’eau devant bien arriver de quelque part, on éclaire la paroi et on distingue 'du noir' 18 ou 20m plus haut en face de nous (en spéléo, le terme étonnant "je vois du noir" signifie qu'en fait, on ne voit rien si ce n'est éventuellement une suite qu'on n'arrive pas à distinguer à cause du manque d'éclairage!). Il nous faudra donc escalader pour savoir. Il commence à faire froid, l’excitation de la 1ere est retombée et il faut faire demi-tour, repasser le 1er laminoir aquatique en sens inverse pour aller se changer rapidement dans la petite salle avant d’entamer la remontée vers la surface…

Les 8 et 13 août, Fred et Dada reviennent pour calibrer le 1er laminoir aquatique (maintenant, c’est plutôt une grosse baignoire dont le plafond a été détruit) puis partent vers l’aval forcer l’étroiture du 2e laminoir aquatique : allongés, sur quasi 40m de long, le nez au raz d’une eau propre et claire dans des vasques larges. Le sol remonte à la fin de ce passage aquatique (ce long passage s’ennoie entièrement lors d’une crue). Le passage n’est pas haut mais une fois passé, il donne sur une vaste galerie qu’ils suivent sur une trentaine de mètres (au moins 3 par 3m par endroit). Ils s’arrêtent sur un chaos de blocs après une trentaine de mètres mais ça continue derrière. 

 

Figure 33 : le terminus actuel de la cavité (peu engageante, la voute mouillante !)


Le 16 août, ils reviennent se tremper dans le long laminoir et après 25m dans du beau et large, s’arrêtent sur une voute mouillante (Figure 33). Quelques mètres avant, 1,5 m au-dessus, se trouve un passage très ventilé aspirant (15 x 60 cm) impénétrable, mais on voit du noir au fond (3 m). Une dizaine de mètres en amont du terminus, une arrivée d’eau (un amont #3 ?) arrive en rive gauche. Cela mesure 3m de large, bien boueux. L’escalade est facile et ajoute une dizaine de mètres de première et termine sur un méandre boueux remontant à courant d’air.

Le 22 et 23 août, sorties solitaires de Dada puis de Fred pour calibrer et déblayer le 1er laminoir aquatique. Fred revisite ensuite le terminus aval et prend quelques photos.

En août 2014, les 2 compères s’acharnent sur le 1er laminoir : on y passe maintenant à 4 pattes.

Le 5 et 12 Septembre, ils nettoient la boue et creusent le sol après le coude jusqu’à la baignoire.

Figure 34: le 1er laminoir aquatique menant à la baignoire#1 (avant les travaux et remblayage partiel)

 

Le 16, c’est avec François Santoro, un fidèle compagnon de route de Dada, qu’ils déblaient le laminoir. Fred prend ensuite des photos.

Le 11 octobre, Dada et Fred passent à nouveau les 2 laminoirs aquatiques, vont à l’extrême fond de l’aval et tentent de désobstruer le fossile remontant en rive gauche (Fig. 36) ; mais c’est trop étroit sur trop long, on arrête de ce côté-là. Il faudrait reporter ce point sur la carte et voir si en surface on ne trouve pas de cavité connue, par laquelle on pourrait descendre et ainsi arriver à ce terminus aval par le dessus. J'ai mon idée...

 Le 7 novembre, Dada débute le calibrage du ‘méandre remontant’ situé à 3m en amont de la base du puits de 4,5m au bout du boyau infernal ; ensuite il s’attaque au somment du puits de 5,5m dans l’aval et finit sa séance dans le 1er laminoir aquatique qui s’est encore rempli d’eau. Concernant le puits de 4,5m, il s’agit de celui qui se trouve au bout du boyau de 17m de long dans la partie supérieure de la cavité. Au pied de ce puits, à droite, se trouve l’aval dans lequel nous avons travaillé jusqu’à présent ; mais à gauche, 2m plus loin, une jolie vasque reçoit l’eau arrivant d’un méandre étroit. Par-là, c’est l’aval du réseau. Est-il fossile ou bien reçoit-il l’eau qui vient tomber dans le puits à -12m, qu’on a délaissé à la fin de la partie connue de la cavité ? Cela pour l’instant, nous ne le savons pas.

Lors de plusieurs séances début décembre, Dada revient en solo calibrer par le bas donc ce méandre vers -20m.

Le 10 décembre, il sort enfin du méandre et déboule dans un puits circulaire bien arrosé de 3m de diamètre et de 6m de haut. Deux jours plus tard, il revient avec Fred calibrer la sortie du méandre et pose des barreaux pour commencer l’escalade de ce puits.

Figure 35: un des terminus à l’aval

Le 16 et le 20 décembre, Dada revient avec Fred et sortent enfin ce puits ! Manque de bol, le somment part en méandre colmaté.

Le 3 janvier 2015, ils équipent proprement le puits et arrangent la sortie du puits car on doit attaquer le méandre remontant en étant encore les pieds dans le puits. La désob du méandre au sommet avance de 1,5m cette fois. Encore 5 séances entre janvier et février pour continuer d’élargir le méandre.

Le 24 février, on pose un fumigène dans le méandre remontant de l’aval -toujours étroit- pour voir où part le courant d’air. En sortant, on voit la fumée sortir d’un trou gros comme le poing dans le « tunnel » de 17m.

Le 10 mars, Christophe se joint à Dada pour une visite du fond. Après le passage du 1er laminoir aquatique, ils visitent la Salle de la RemonDada. Ensuite, Christophe tente de passer l’étroiture qui bloque le passage du 2e laminoir aquatique mais il ne passe pas. Ce qui est calibré pour Fred et Dada ne l’est pas forcément pour son gabarit. En avril, Dada revient juste avant la 1ère baignoire vers -50m de profondeur pour repérer des départs situés juste avant et qui semblent en relation avec une petite salle borgne repéré de l’autre côté du bain forcé dans la Salle de la RemonDada. C’est vrai qu’un shunt à ce niveau permettrait d’éviter ce bain pas agréable puis un ramping dans un boyau humide et boueux (Figures 36a, b et c pour montrer l'évolution du passage).

Le 12 et le 21 avril, Dada et Fred reviennent tirer dans le méandre en haut du puits de 6m pour tenter de forcer ce passage qui pourrait débouler sur une 2ème sortie. 

 

Figure 36a: le shunt vers la Salle de la RemonDada  (vierge, avant calibrage)

Lors d’une séance, le 28 avril 2015, Dada et Christophe rencontrent en se préparant sous les pins (par un hasard fortuit) l’hydrogéologue Guillaume Tennevin du bureau d’études H2EA. Ce dernier venait de finir un traçage dans le cadre d’une étude. Un petit camion-citerne de Force 06 et de son personnel ont aidé pour 'chasser' dans l’embut un mélange d’une cinquantaine de litres d’eau et de sulforhodamine B. Après présentations et discussion, lui expliquant nous sur quoi nous travaillons, nos objectifs et lui la raison de sa mission, nous descendons dans l’embut. Ce traçage inopiné nous permettra peut-être de mieux comprendre le fonctionnement de cette cavité simple en apparence. Qui sait ? Un peu inquiets cependant à l’idée de se contorsionner dans des passages remplis de colorant, nous avons quand même décidé de continuer la séance.

Jusqu’à la perte à -12 m, nous pataugeons dans quelques laisses d’eau bien roses qui y disparaissent. Nous ne sommes donc pas surpris de ne pas trouver de traces de colorants dans le « tunnel » de 17 m. Ce conduit n’est en effet emprunté par l’eau qu’en cas de très grosses crues et n’a pas été emprunté par le petit débit d’eau sortant du tuyau du camion-citerne de Force 06. Et à notre surprise, à la base du P4,5 terminant le boyau de 17 m, il n’y a aucune trace du colorant. Nous pensions que l’actif se perdant dans la perte à -15 m, avant le « tunnel », arrivait quelque part à la base de ce puits, voire éventuellement dans le méandre que Dada avait ouvert. Mais, alors, où passe l’eau de l’actif ?

Laissant de côté pour l’instant ces considérations trop théoriques, nous déconnectons nos cerveaux et remontons le P6, ainsi que le méandre si durement ouvert à son somment. Un peu de calibrage et nous sortons dans une petite salle de 2 m de long par 1 m de large et 2 m de haut. La suite est en laminoir vers le haut.

Le 19 et 23 juin, Dada et Christophe reviennent pour finaliser l’équipement de la sortie du puits après le « tunnel » puis pour calibrer le méandre remontant entrevu fin avril en haut du P6 (vu une suite plus grande derrière).

Le 30 juin, le même binôme revient dans le haut du réseau pour le calibrer et se dirige ensuite vers le fond. Sans plus penser à elle, ils retrouvent avec surprise des traces de rhodamine vers -35 m sur une coulée de calcite, dans une partie humide du réseau. Nous l’avions ouverte l’année d’avant, en juillet 2014 et nous avions pensé que de l’eau devait surement arriver de quelque part car cette partie du réseau était propre comparativement à quelques mètres en amont. Toute la partie dans laquelle nous progressions jusqu’à ce point est en fait une partie fossile qui peut surement être active lors des (très) grosses crues. Donc, le vrai réseau actif est « ailleurs » : 20m d’épaisseurs de roche où nous avons une circulation supérieure inconnue. Le traçage (à défaut d’avoir été un succès opérationnel d’un point de vue hydrogéologique) nous aura permis de comprendre le fonctionnement d’une partie de la cavité.

Ainsi colorée, tombée dans la perte en bout du réseau connu sortait (du moins en partie) en haut du méandre que l’on avait ouvert en 2014, là où nous avions trouvé le passage étonnement « humide et propre »… L’endroit exact de la sortie de l’eau reste à déterminer, mais pourrait donner suite à une désobstruction en hauteur qui permettrait de remonter l’actif jusqu’à la perte, de quoi ajouter encore des mètres de première à la cavité. Pour cela, il faudrait escalader dans le méandre, poser des barreaux, élargir et tirer … 

            Nous suivons donc l’eau colorée jusque dans la baignoire à -50 m et aussi étonnement dans la galerie juste avant la Salle de la RemonDada. Le colorant est donc passé verticalement quelque part dans une partie du shunt que Dada veut creuser. Ça nous rappelle aussi un bout de paille trouvé au sol dans la Salle de la RemonDada. Donc encore pas mal d’interrogations dans le fonctionnement de cette cavité.

Les 7, 17 et 26 juillet, Dada continue sur la suite entrevue en haut du méandre, dans la petite salle.

Le 29 juillet, il ouvre le passage et marche dans une petite galerie de 7 m de long sur 1,5 m de large, 3 m de haut. La suite continue en diaclase au sol … Nous ne sommes pas très loin de la surface à cet endroit.

Figure 36b: le shunt (pendant le calibrage)

  Tout le mois d’août, Dada seul ou avec Christophe, poursuivent sur ce passage, ainsi que sur l’ouverture du shunt à -50 m, mais également sur l’élargissement de l’accès au 1er laminoir aquatique. Lors de trois sorties en septembre (les 8, 18 et 25), il continue l’ouverture du shunt à -50 m et améliore encore et encore l’équipement sur certains ressauts.

La suite du shunt a l’air vraiment étroite, mais Dada est motivé à ne plus se mouiller. Un Dada n’aime pas l’eau, nous le savons tous … Maintenant, nous savons que la dernière « suite » possible se trouve dans l’amont #2, dans le haut de la Salle de la RemonDada, l’aval actif n’étant pas praticable (ou alors avec de gros moyens).

Le 6 octobre 2015, Dada et Christophe reviennent après de grosses pluies et bien évidemment, lors de la descente, tout est propre, mais humide. Au fond vers -50 m, on trouve de la mousse de crue partout et notre camp de base est dévasté. Tout le matériel qu’on avait entreposé est parti dans la partie « aval » et dans la baignoire. On ramasse tout ce qui traine et nous les reposons sur les banquettes naturelles, sachant que lors de la prochaine crue, tout sera à nouveau balayé. On part ensuite travailler sur le shunt, ainsi que sur le haut du R3.

Les trois dernières séances de 2015 avec Dada, Fred et Christophe se poursuivent sur le shunt vers -50 m. Mais l’avancée est lente car on tire dans un calcaire à passées marneuses répondant mal aux tirs. Les 4 premières séances de 2016 (3/01, 27/05, 7/08, 16/08), on s’acharne sur ce passage. Les sorties sont maintenant plus espacées. Il y a d’autres chantiers dans nos têtes, on se lasse un peu de ce F1 si prometteur au début. Lors des 2 dernières séances, ça a avancé de 1 m, mais la suite est un méandre peu engageant car étroit.

Figure 36c: le shunt vers la Salle de la RemonDada  (après calibrage)

  Le 26 août, sortie initiation commando avec les cousins de Christophe Thierry et Ulrich qu’il a voulu soumettre à un test de progression 'hard'. Pendant que Dada bosse sur le shunt, nous refranchissons la baignoire #1, passons par le boyau infâme et nous allons jusqu’à la Salle de la RemonDada. Petite halte en chemin dans la salle adjacente à droite qui devrait voir -peut-être un jour- débouler le shunt de Dada. Une liaison à la voix est faite. En se penchant sur le gour, on entend Dada qui est de l’autre côté du ‘mur’. Mais ce dernier se rend compte que le passage qu’il croit élargir en notre direction, n’est pas le bon ! Clarification faite pour lui, on poursuit notre chemin, visitant cette grande salle puis ensuite, on retourne jusqu’au départ du 2e laminoir situé 30 m plus en aval. Christophe y fait 2 tirs pour permettre un passage plus facile pour les grands gabarits. Puis nous remontons en surface pour cause de fatigue générale.

Le 9 septembre, Dada retourne dans la petite galerie qu’il a ouverte, en haut du puits remontant de 6 m. Il calibre encore et sort enfin ! Où sommes-nous maintenant ? Il réalise qu’il est en haut du R4 situé quelques mètres sous l’entrée de la cavité. Il vient de faire sans le vouloir un shunt à l’amont de l’actif qui permet d’éviter le boyau de 17 m et qui rajoute encore un peu de complexité à la formation de cette petite cavité pas si simple que cela... 

Figure 37: détail de la coupe montrant l'arrivée de l'actif (extrait topo officielle)

  Les 20 septembre, 3 et 9 octobre, il redescend calibrer « son » autre shunt à -50 m, celui permettant de court-circuiter la 1e baignoire. Systématiquement, la séance s’achève en calibrant la sortie de l’autre shunt supérieur (« la bouclette »), celle qui aboutit dans le ressaut à -7 m. Une autre petite suite est trouvée dans la partie connue vers -3 m, à gauche juste après l’étroiture de l’entrée (dans le dos d'Alexis, Figure 6). Ce bout de galerie (non topographié) se dirige sous le pré, entre -3 et -4 m, à l’opposé du réseau principal. On avance de 6 m pour butter sur un colmatage impénétrable. Nous avons jugé la suite pas intéressante car trop proche de la surface. Nous arrêtons les frais à ce niveau.

Les 5 dernières sorties de 2016 ont pour objet de continuer le creusement du shunt situé à -50 m, ainsi que le calibrage de la jonction du réseau supérieur avec la partie connue (« la bouclette »). 

L'escalade dans la salle de la RemonDada

Cette dernière partie va décrire la découverte du réseau amont #2 qui est située au-dessus de la Salle de la RemonDada et qui remonte jusqu’à -7 m sous le champ des Bertrands. Onze autres sorties ont été nécessaires pour arrive à cet autre terminus, qu'on a pas atteint en descendant mais en remontant. Pour mémoire, la salle fait 23 m de haut. La 1ère séance d’escalade commence lors d’une sortie « club » un dimanche de Mai 2017 et c'est Dada qui s'y colle (c'est le seul à avoir confiance en ses fers à béton pourraient dire les mauvaises langues...). Audrey, Ondine, Jérôme (ndlr : Jérôme filme en même temps et le lien de la vidéo se trouve en fin de CR) sont présents. Christophe et Dada les guident. Pendant que Christophe commence une partie de son relevé topo seul depuis la surface, l’équipe progresse jusqu’à la Salle de la RemonDada. Une fois tous en bas, on passe le bas des combinaison néoprènes et on part dans l’aval pendant que Daniel prépare ses fers à bétons.

Soulignons qu’au GSV, l’escalade d’un puits par le bas ne se fait ni en libre, ni en « artif », ni au mât d’escalade, mais « au fer à béton » (Copyright GSV) : pour cela, il suffit d’une vieille plieuse de fers à béton réformée, de fers à bétons de 8 ou de 10 de récupération pliés en U, d’un perfo léger, d’une massette et d’huile de coude. Sans oublier aussi quelques amarrages pour s’assurer au fur et à mesure qu’on progresse vers le haut. La visite de la cavité se poursuit pour une partie du GSV qui tente d’aller à l’aval (pour la petite histoire, dans l’équipe d’aquanautes, seule Ondine arrivera à passer l’étroiture de sortie du laminoir aquatique de 40 m et à aller se promener au fond de la galerie terminale. Christophe du fait de son gabarit ne passe pas et cela refroidit le reste de l’équipe. Daniel, pendant que les autres pataugent, débute son escalade dans la grande fissure (méandre qui pince) se trouvant dans la partie Nord de la salle, alternant le plantage de fers à bétons et l’escalade. Mais il arrive en haut de cette fissure-méandre sur un cul de sac (Figures 38, 39 et 40). 


Figure 38: le début de l'escalade, en équilibre sur une colonnette!



Figure 39: équipement naturel en haut de la "faille"


Figure 40: la "faille" escaladée, au fond de la salle de la RemonDada (kit rouge sur la vire)


Figure 41 : la 2e partie de l'escalade au-dessus de la vire


Figure 42: la lucarne en point de mire (vue d'en bas)

 
Figure 43: la lucarne vue du palier (+20m au dessus du sol de la salle)

Le 24 mai, il revient avec Frédéric. Daniel a pour but de commencer son escalade sous la lucarne. Pour cela, il fait une traversé horizontale sur une strate proéminente à 6 m de haut, sorte de palier naturel, depuis la fissure escaladée trois semaines avant (et qu’il a laissée équipée) qui lui permet de revenir sous la lucarne. Ainsi, à 6m de haut sous cette lucarne, il grimpe ce jour de 4 m et arrive à 10 m de haut par rapport au sol de la salle (Figures 41 et 42).

Le 7 juin, aidé de Frédéric, Daniel continue son escalade et arrive à sortir par une grosse lucarne donnant sur 2 vides consécutifs (Figure 43): en face de lui, le palier constitue une sorte de salle de 4 m de long par 2 m de large, 4 m de haut. Et sur la droite, une petite vire donne sur une petite salle circulaire avec l’arrivée d’un petit actif temporaire. La suite est en hauteur à gauche et semble donner sur une autre galerie.

Le 21 juin, les deux compères reviennent sécuriser l’escalade en refaisant proprement l’équipement depuis la lucarne, un double amarrage en tête de puits ainsi que 2 fractionnements permettant d’arriver dans ce nouveau réseau (ndlr : équipement d’exploration qu’il conviendrait de remplacer par du fixe définitif). Ils poursuivent aussi l’exploration : un R2 est escaladé et donne sur une galerie de 6 m de long, 2 m de large et 7 m de haut. Un P3 termine cette galerie. Son fond est bouché d’argile et de blocs (Figures 44 et 45). La suite est là aussi en hauteur. Il faudrait encore escalader du côté droit de la galerie. La petite salle circulaire située du côté droit en haut de la 1ère escalade, bien qu’en apparence sans issue, laisse apercevoir un petit départ. 

Figure 44: le puits de 3m en cours d'équipement

 

Figure 45 : le puits de 3m (qui donne sur rien!)


 C’est le 5 juillet que Christophe, Daniel et Frederic reviennent tenter leur chance. Pendant que Daniel commence sa remonté au fer à béton sur 7 m de haut (située avant le P3 aveugle), Christophe et Fred s’attaquent à la désobstruction juste au-dessus de l’arrivée du petit actif, dans la salle de droite après la lucarne. Plusieurs tirs sont nécessaires pour ouvrir un passage bas et assez étroit, donnant sur une petite suite remontante très joliment concrétionné que nous n’avons pas voulu abimer en allant plus avant, vue la profondeur où nous sommes (Figures 46 à 49). De son côté, Daniel arrive sur un petit palier donnant sur un petite étroiture avec une galerie remontante d’une dizaine de mètres de long, laissant entrevoir une autre escalade à faire …

Figure 46: une fistuleuse dans le réseau amont

Figure 47: un petit gours actif dans le réseau amont

Figure 48 : une arrivée d'actif dans le réseau amont

 

Le 23 juillet, c’est accompagné de Mathieu que le chantier continue. Pose de barreaux et mesures des nouvelles parties.

Le 13 août, Dada revient pour calibrer le haut du R2 et commence une autre remontée.

Le 23 aout, le trio (Dada, Fred et Christophe) est de retour : Daniel termine sa remontée (qui progresse quelques mètres de haut), arrive sur un gros palier concrétionné. Il y a 2 suites à voir : une petite galerie au sol et une autre au plafond. 

 

Figure 49: une arrivée d'eau joliment concrétionnée

 

Le 6 septembre, Dada et Frederic reviennent : suite en plafond et arrêt à -11 m sur une diaclase. Ensuite, ils entreprennent la désobstruction d’une petite galerie, avec une suite possible derrière trémie.

Le 20 septembre, le duo revient et travaillent sur le point haut de la diaclase vue précédemment et sur la petite galerie terminant sur trémie.

Le 15 octobre, ils reviennent encore, mais dans la diaclase, s’arrêtent à -7 m dans un tout petit volume en haut de la diaclase. Quant à la galerie derrière la trémie, il s’avère que cet endroit est instable et dangereux : la trémie s’est effondrée depuis la dernière séance. Nous préférons arrêter là les frais pour cette partie, nous n’irons pas plus haut. Un report en surface montre que nous sommes sous le champ des Bertrands à une vingtaine de mètres -en plan- de l’entrée de la cavité. Or en surface, rien ne laisse entrevoir un quelconque passage vers le bas à moins d’utiliser une pelle mécanique… A l’avenir, un repérage au barreau magnétique pourrait permettre d’affiner la position de ce 'point haut' mais l’ouverture du passage n’amènerait rien de plus à la cavité, si ce n’est perturber le fonctionnement naturel de la cavité (puisque l’eau de surface rentre sous terre par l’entrée naturelle).

Ici se termine donc le récit de la désobstruction de l’embut du Débram. Nous avons réussi à faire d'une petite cavité sans prétention une cavité majeure de la commune, extrêmement importante d'un point de vue hydrogéologique et qui a encore un gros potentiel spéléologique. Il faut seulement être motivés, et certains d'entre nous le sommes encore! Nous y avons décrit les travaux entrepris par plusieurs spéléos des Club de Cagnes-sur-Mer, puis du Groupe Spéléologique de Vence depuis 1992 (réouverture la cavité) jusqu’aux découvertes des réseaux aval (voûte mouillante terminale avale) et du petit réseau amont sous la surface fin 2017.  Soit en tout 127 sorties « désob » effectuées jusque fin 2017 (12/1999 à 12/2016 pour la partie aval et amont #1, puis entre le 8/05/2017 et le 15/10/2017 pour la partie amont #2).

Que toutes les bonnes volontés qui ont permis ce résultat y soit ici remerciées (Zic, c’est ton idée à l’origine, surement influencé par les connaissances de ton père Paul). Que Robert Faivre y trouve aussi un grand merci car ce travail est aussi le résultat de discussions que nous avons eues ensemble. Il n’a pas hésité à partager avec nous sa connaissance de « son » territoire de prédilection, Roquefort les Pins.

La topographie a été levée par Christophe et Daniel (DistoX2, Auriga) lors de trois séances en 2017-2018 (1ère séance entre la surface et la Salle de la RemonDada dans l’amont #2 par Christophe. 2nde séance : Christophe et Dada ont levé la topo sur le retour d’une séance désob 'humide' au terminus actuel, de l’extrême aval jusqu’à la sortie du shunt de Dada. 3ième séance dans la partie haute de l’amont #2, au-delà de la Salle de la RemonDada). La synthèse topographique a été réalisée sur Therion sous PC par Christophe. Elle sera disponible dans le bulletin de décembre 2021 du CDS06. Les coupes géologiques ont été faites par Christophe (sous QGIS grâce à un plugin super pratique) sur la carte géologique Cannes-Grasse numérisée du BRGM (données publiques).

→  Vidéo de la coloration (H2EA) ici : 



→ Vidéo (faite par Jérôme) de la visite de l’embut ici : 



→ Blog de Christian Verducci relatant la découverte de sa grotte (Beaume Robert) ici : http://verduci-christian.e-monsite.com/

Crédits photos : Robert Faivre (embut de la Miagne), Florian Luciano (magnifique photo d'Ondine dans la salle de la RemonDada), Frederic Péan (photos de l'escalade) et Christophe Salti (pour le reste des photos). 

Si vous avez aimé ce récit, il en existe un autre dans ce blog (avec les mêmes protagonistes) au mois d'octobre 2016 et qui relate la découverte et l'exploration d'une grotte sous le Baou des Blancs, dans la région de Vence. Le raccourci pour y accéder est : 

                http://gsv06.blogspot.com/2016/10/Historique-de-la-decouverte-de-la.html


Pour le club,

Christophe Salti

(Florian Luciano et François Santoro pour la relecture et les remarques constructives)


Figure 50: localisation de la coupe géologique sur la carte topo (OpenStreetMap sous QGIS)



Figure 51: localisation de la coupe sur la carte géologique (BRGM sous QGIS)


Figure 52: Dada a trop bu de sulforhodamine


Figure 53: Fred au milieu des gours de la Salle de la RemonDada


 

Figure 54: vue du fond de la Salle de la RemonDada vers l’entrée


Figure 55: Ondine en contemplation devant les gours de la salle de la RemonDada (Florian Luciano)



Figure 56 : escalade dans la salle de la RemonDada pour accéder au réseau amont#2

Figure 57: Gollum de Tasmanie qui hante et protège cette cavité

Et pour finir quelques uns des protagonistes de cette histoire (si les autres participants veulent avoir leur tronche affichée ici, qu'ils fassent signe!).


Daniel le désobeur fou
Eric alias le Grand Zic, l'initiateur des travaux





Frédéric la taupe


Alexis, mon vieux pote

Florian, photographe et 'désobeur' 

Robert, la référence sur tout ce qui touche à Roquefort les Pins

Jérôme le poète-cinéaste et François, le compagnon de (dé)route de Dada



Chris