16 avr. 2023

Retour aux trois mille-pattes

Participants : Daniel, François, Jérôme
TPST : 3h00

Sur proposition du Président Dada, il fut décidé de faire, ce dimanche, un saut à la grotte des trois mille-pattes. Pour François et moi, cela faisait près de neuf ans que nous n'avions plus posé la botte dans ce vaste réseau labyrinthique qui se développe aujourd'hui sur plus de 1500 mètres et s'étage sur 45 mètres au coeur du Baou des Blancs. Découverte et explorée depuis 2013 par Daniel et ses sbires du GSV, la grotte des trois mille-pattes est toujours la plus grande cavité de la commune de Vence. Bien que topographiée et visitée dans ses moindres recoins, elle recelait pour le Grand Homme un dernier mystère à éclaircir, en l'occurrence une éventuelle continuation tout en haut d'une coulée de calcite située à 30 mètres de l'entrée. Problème : un rocher mal placé empêchait d'accéder à la suite et nécessitait de fait un peu de manutention pyrotechnique, d'où le but de cette sortie dominicale.

Rendez-vous fut donc fixé à 9 heures au départ du sentier bien raide menant au trou. Temps sec et température printanière : des conditions idéales pour que les trois phtisiques que nous sommes puissent gravir les 145 mètres de dénivelé sans cracher trop de morceaux de poumons. Trente-cinq minutes plus tard nous sommes à l'entrée de la grotte, même pas essoufflés. Tout en bavant sur les absents qui ont toujours tort (Bernard qui a filé sur son île comme un rat, Mathieu qui est allé réapprendre à utiliser un téléphone filaire au Calernaum avec le SSF, Pierre qui est allé chercher de l'eau dans un ruisseau à sec,etc.) nous nous équipons tranquillement et entrons dans la cavité vers 10h15.


De belles toiles d'araignée bien poussiéreuses laissent à penser que personne ne s'est aventuré là-dedans depuis lulure. Après une trentaine de mètres de reptation et de quatre-pattage nous débouchons dans la première salle du réseau (finement baptisée "salle n°1"). Nous y déjeunerons. Daniel nous invite à le suivre dans l'ascension d'une grande coulée de calcite qui mène à la zone des travaux. Dès que François entend le mot "coulée" il ne peut s'empêcher de nous narrer ses tribulations fécales du matin, à savoir trois chiasses carabinées (appelées aussi "coulées vertes" du côté de Nice). Ladite coulée, équipée d'une corde, est aussi glissante que les diarrhées du séminariste et aussi pentue que le gosier présidentiel, bref tout est prévu pour que l'on se casse la figure à la première occasion.

Coulée du matin, chagrin...

Fort heureusement, Daniel nous avait bricolé des harnais de fortune avec de vieilles poignées usées pour sécuriser l'ascension et surtout la descente. Et oui, les trois-mille pattes est une cavité dépourvue de puits nécessitant baudriers et quincaillerie, donc on y va généralement les mains dans les poches...

Arrivés devant le bloc à faire péter, François et moi écoutons le Président imaginer une suite faite de grandes galeries et de belles salles bien décorées qui porteraient le développement du réseau à plus de 3000 mètres. En attendant nous ne voyons qu'un gros morceau de roche obstruer un boyau pas plus large que dix anus de mouettes (l' "anus de mouette" est une unité de mesure fréquemment utilisée par le GSV pour évaluer le diamètre des orifices microscopiques à élargir d'urgence).

"La suite c'est par là"


"mais avant il faut dégager cette merde..."

Le Président ne nous voulant pas dans ses pattes pendant qu'il officie, il nous envoie donc visiter la salle n°2 et la salle du Carrefour en nous expliquant avec force détails l'itinéraire pour y arriver. Rappelons que la grotte des trois mille-pattes est un labyrinthe géant dont la topographie a demandé dix jours de mesures avec un Disto perfectionné et trois mois de modélisation informatique pour, au final, ressembler à une grosse pelote de fils parfaitement inutilisable comme plan d'orientation. François et moi nous regardons d'un air dubitatif, ayant autant le sens de l'orientation l'un que l'autre, et n'ayant strictement rien compris aux explications présidentielles. Nous redescendons donc précautionneusement la coulée de calcite et partons à la recherche de la salle n°2. Par chance, et comme son nom l'indique, elle fait suite à la salle n°1 et n'est donc pas trop difficile à trouver. Nous y découvrons de belles méduses et des gours encore pleins malgré la sècheresse.




Nous retournons sans difficultés à la salle n°1 et nous mettons à la recherche de la salle du Carrefour. Comme aucun de nous n'a rien compris aux directives présidentielles nous faisons appel à nos mémoires défaillantes pour tenter de reconstituer un semblant d'itinéraire qui nous évitera de nous perdre et de passer des heures à tenter de retrouver notre chemin. C'est donc la boule au ventre que nous empruntons une lucarne artificiellement élargie (aucun mérite, Daniel nous l'avait montrée). Au-delà, nous débouchons dans une petite salle d'où partent plusieurs diverticules et où j'aperçois surtout une corde à noeuds. "Dada nous avait bien parlé d'une main-courante pour désescalader un ressaut de 4 mètres, non ?" je demande à François qui me retourne un regard de merlan frit genre "tu es sûr ?"."Une corde à  noeuds c'est comme une main-courante, non ? Et puis cette corde à noeud elle descend dans un trou qui doit bien faire quatre mètres..." insistè-je auprès de mon compagnon de galère. "Attends-moi là je vais voir". Hardiment, j'empoigne la corde à noeuds et me retrouve trois mètres plus bas face à quatre boyaux tous aussi appétissants les uns que les autres. J'en essaye un, puis deux et comme ils ont l'air de ne déboucher sur rien, je remonte fissa avant de me faire piéger. Je dis à François "Tu sais quoi, on va attendre qu'il ait fini ses petites affaires, on bouffe et après on ira à la salle du Carrefour avec lui." 

Nous patientons donc dans la salle n°1 pendant trente bonnes minutes avant de voir arriver un Dada plutôt déçu : son bloc une fois dégagé lui a permis de progresser sur une poignée de mètres jusqu'à buter sur un minuscule orifice peu engageant. Nous fêtons donc la fin officielle de l'exploration de la grotte des trois mille-pattes avec une demi-bouteille de bordeaux, nous déjeunons, et sous les quolibets de Daniel, nous le suivons tête basse vers la salle du Carrefour à laquelle la corde à noeuds ne nous aurait jamais mené de toutes façons. Nous y croisons l'inévitable rhinolophe de permanence et de belles concrétions colorées qui font le charme de toutes les grandes salles du réseau des trois mille-pattes.



Nous nous extirpons du trou vers 13h15, en nous remémorant la sortie de 2013 qui nous avait mené aux confins du réseau fraîchement découvert, dans la joie et la bonne humeur.



Jérôme

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire