27 janv. 2019

Une soupe à la Mescla

Participants : Audrey, Daniel, François, Jérôme, Mathieu et Ondine
TPST : 4h00

Le début d’année s’avère particulièrement festif au GSV puisqu’à l’occasion des anniversaires rapprochés d’Ondine et de Mathieu, le Président a décrété un déjeuner dominical à la Mescla. La vieille garde a applaudi le projet (tas de feignants l’idolâtrie ou de fainéants tout court ?), de même que la gent féminine (Audrey en réacclimatation spéléologique et Ondine en pré-convalescence du genou). Seule la nouvelle génération avide de sensations fortes a décliné cette sortie trop plan-plan à son goût (Pierre est au stage de Spéléo-Secours, Johann devant Michel Drucker). Est également excusé notre grand ancêtre Bernard pour raison médicale.

Il caille encore vigoureusement quand la fine équipe se retrouve à 11h sur le parking proche de la grotte. Nous nous équipons en quatrième vitesse en claquant des dents. Afin d’honorer comme il se doit la sémillante et herbivore Ondine, Mathieu et moi avons décidé d’amener des mets végétariens. Pour éviter une émeute de la part des autres omnivores carnassiers, libre choix leur a été laissé quant à leurs apports au menu du jour.

Lorsque le Président apprend avec émerveillement que Mathieu nous a concocté une soupe de légumes maison qui sera réchauffée sur le camping-gaz, il proclame au moment d’entrer dans la cavité : « Une soupe, une pipe et au lit ! ». Cela fait naturellement tousser le très fédéral Mathieu qui est le garant de la charte déontologique de la FFS (la charte proscrit en effet toute allusion sexuelle déplacée lors des sorties spéléo), et fait se signer le Père François (qui a toujours l’esprit mal tourné malgré son diplôme de séminariste). Ondine, qui en a vu des vertes et des pas mûres pouffe tandis que la jeune et ingénue Audrey demande à Dada : « Tu fumes vraiment la pipe avant d’aller au lit ? ». Notre Président, un peu déstabilisé, avoue qu’il a emprunté le slogan à notre doyen Bernard qui, Oléronais d’adoption, a de tous temps proféré ce cri de ralliement séculaire des paysans charentais à l’issue d’une dure journée aux champs. C’est bien connu, les absents ont toujours tort... Daniel en profite donc pour remettre les pendules à l’heure et rabroue la bande de vicelards qui ont interprété de travers ce qui n’était à la base qu’une exclamation rurale bien innocente.

Cette mise au point sémantique faite, nous pénétrons vers 11h45, pour la énième fois, la célèbre cavité qui a vu passer des pleins bataillons de novices dont la plupart n’ont plus jamais fait de spéléo par la suite…

Nous laissons les victuailles dans la salle au sol bétonné qui accueille traditionnellement les piques-nique souterrains à la Mescla et entreprenons sous la houlette d’un Dada particulièrement en forme une petite exploration apéritive de la grotte, direction le siphon n°1. Ondine, qui boitille encore un peu est dispensée de promenade mais se retrouve de corvée de dressage de table. Le Président qui commence à avoir un petit creux mène la troupe au pas de charge en comptant bien pouvoir s’attabler vers 12h30. Comme il a une horloge greffée au niveau de l’estomac, nous sommes de retour à midi et demie tapante en ayant eu l’impression de voir défiler les galeries à travers les vitres d’un TGV.




Le délicat fumet de la bonne soupe maison réchauffée par Ondine nous accueille. François fait remarquer que notre ami Mathieu est très doué pour le potage. Je lui répond doctement qu’il est normal que Mathieu soit un bon potager puis qu’il fait de la spéléo avec des potes âgés, et que de fait il ira toujours là où ses potes iront. Audrey s’étonne qu’il y ait du potiron dans la soupe car elle n’en sent pas le goût. A propos de potes et d’âge, le Président met un terme à ce déballage de calembours vaseux pour porter un toast à la santé d’Ondine et de Mathieu qui, du coup et mécaniquement, deviennent des potes de plus en plus âgés. Lorsque je demande à Ondine ce que ça lui fait d’être vieille, j’ai juste le temps de me baisser pour éviter un tir tendu de filets de poireaux brûlants. Mais c’est qu’en plus elle devient susceptible…


Nous complimentons naturellement Mathieu sur sa soupe, ce qui le fait rosir de plaisir et nous détailler la composition du brouet. Nous apprenons entre autres qu’il y a mis des topinambours, cette racine fort prisée des gourmets sous l’Occupation. Mathieu, en fin historien, nous avoue qu’il a ajouté du topinambour vu que son âge tout neuf (43), lui a fait penser à cette période agitée de notre histoire. Nous saluons ce souci louable du détail historique, et pour coller encore plus à l’Histoire avec un grand H, je lui propose de faire chabrot en noyant notre fond de potage d’un trait de vin rouge comme le faisaient les maquisards du Vercors au retour d’une mission de sabotage. François fait remarquer qu’entre la pipe charentaise et le chabrot dauphinois, on n’est pas sortis de l’auberge…

C’est en partie vrai car entre la charcuterie, les champignons, les crudités et les fromages qui puent, les agapes nous amènent aux alentours de 14h00. Il est alors temps pour Audrey d’habiller de bougies la belle tarte aux pommes qu’elle a amenée et pour Mathieu de sabrer l’inévitable bouteille de champagne. Ondine et Mathieu sont priés d’éteindre ensemble les bougies pour diminuer les risques de propagation d’infections diverses et variées dont ils pourraient être porteurs. Ils se soufflent donc mutuellement dans la figure tout en épargnant le gâteau. Puisqu’on en est aux pommes, François exhibe un vieux calva de derrière les fagots qui finira de nous achever et de supprimer définitivement les risques de contamination.







Avec le même enthousiasme que le type sur le point de se faire cautériser les hémorroïdes sans anesthésie, le Président nous propose du bout des lèvres d’aller visiter le réseau supérieur de la grotte. Nous lui emboîtons le pas avec fatalisme, comptant sur les bienfaits de la randonnée spéléologique pour nous faciliter la digestion. Les démarches sont floues et les équilibres précaires, mais nous parvenons sans encombre jusqu’au lac suspendu que nous ne franchirons pas pour cause de niveau trop haut. Ondine, restée au bivouac, en a profité pour aller nettoyer dans la rivière quelques vieilles affaires crépies de boue.

Il n’est pas loin de 15h30 quand nous rejoignons le camp de base et pile 15h45 quand nous sortons du trou. La soupe de légumes ayant des vertus laxatives bien connues, je ne m’étonne pas de voir mes compagnons s’égayer dans les buissons alentours malgré le vent vif et le froid mordant… Du coup, et par solidarité, je fais de même.

Jérôme

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