22 mai 2022

Reculade à l'aven Yvan

Participants : Daniel, Jérôme
Participants pro-statiques : Bernard, François
TPST : 3h30

Cela faisait un moment que le GSV n'avait pas mis les pieds au fond de l'aven Yvan à Saint-Cézaire, en gros depuis les festivités du COVID. Le dernier à y avoir bossé est l'ami Pierre qui, à grands coups de pailles, avait atteint la profondeur approximative de moins 90 mètres. Le Président a donc proposé, lors de la dernière réunion, d'y faire un tour car à la cote moins 40, une lucarne en hauteur laissait présager une suite éventuelle. En plus la cavité est déjà équipée, ce qui n'est pas pour déplaire au Grand Homme qui devient un peu feignant en vieillissant...

En ce dimanche grisounet, la (très) vieille garde du club est au rendez-vous de 9h30 sur le parking des Baragnes. De soixante à quatre-vingts ans, toutes les décennies décaties sont représentées et, malgré quelques douleurs diverses et variées, notre doyen Bernard a tenu à être de l'aventure. François, particulièrement en forme, se demande s'il ne serait pas plus rentable de vendre le GSV à Orpéa pour en faire un Ehpad souterrain. Ce à quoi un Dada tout courroucé rétorque que la misérable subvention de la mairie de Vence et les faméliques cotisations des rares membres valent mille fois mieux que les millions de la multinationale des vieux. On a des valeurs ou on n'en a pas.

Trois quarts d'heure plus tard, Daniel s'enfile dans le puits d'entrée dont la particularité est qu'à la cote moins quatre il se transforme sur un petit mètre cinquante en puits-chatière. Rien de comparable avec celui de la Glacière et encore moins avec celui des Gleirettes, néanmoins le Président réussit à nous le décrire comme une épopée infernale baignée de sang et de larmes. Ça ne loupe pas, le Bernard qui était moyennement tiède nous fait un blocage. Pourtant je n'avais pas souvenir d'une quelconque pénibilité lors du passage en remontée de ce petit rétrécissement, ayant déjà fait le trou quatre ou cinq fois. Avec force cajoleries, compliments et paroles rassurantes, j'explique au pauvre Bernard que ce vieux psychopathe de Dada perdait la boule et voyait le mal partout. En fait, le mini-puits chatière se passe tranquilou avec de petites amplitudes de poignée et de pédale car la place manque, mais sans aucune fatigue ni risque de coincement. Il faut juste prendre son temps. Persuadé d'avoir rasséréné notre bon Bernard, je m'introduis dans le trou et franchis au ralenti le passage "critique" en lui montrant que ça ne posera aucun problème à la remontée. Dix mètres plus bas, je stationne un moment pour attendre le Vénérable. J'entends palabrer à la surface mais toujours pas de mouvement de corde qui indiquerait une descente. J'appelle. Rien. La Vieillasse a renoncé et Don Francesco, en toute charité chrétienne, a décidé de l'accompagner dans sa retraite. 

Je rejoins donc Dada à la cote moins 40 pour lui annoncer la nouvelle. Le Grand Homme rouscaille un chouïa mais se met vite à l'ouvrage : il a quelques broches à planter pour atteindre une lucarne placée une poignée de mètres en hauteur. Il m'explique qu'avec un peu de chance, elle donnera sur un réseau de puits parallèles ou, qu'avec un peu de mouise, elle bouclera sur le P20 au sommet duquel nous nous tenons. Je le laisse en tête à tête avec son perforateur Bosch tout neuf et je descend tranquillement jusqu'à l'ancien "anus de mouette", vers moins 80. Rappelons qu'après des mois d'effort, l'orifice rectiforme de quelques centimètres avait été transformé en un beau petit conduit permettant de rejoindre confortablement un ressaut de cinq mètres. En bas, on trouve une petite salle avec une lucarne bien élargie par Dada, laquelle lucarne donne sur un dernier volume où, lors de ma précédente visite, la suite se résumait en une microscopique faille très légèrement ventilée. C'était sans compter sur la ténacité et la force de Pierre, surnommé l' "Attila des cavernes" qui, en quelques séances rajouta cinq bon mètres de boyau pour buter sur du rien. Je confirme : le beau travail de calibrage de notre ami s'arrête sur un interstice calcifié qui présente le double inconvénient d'être en permanence arrosé et de ne pas souffler ni aspirer des masses. L'eau n'étant pas la meilleure amie du perfo, et les perspectives de suite n'étant pas très réjouissantes, il est clair que cette cote de plus ou moins 90 mètres signe la profondeur provisoirement définitive de l'aven Yvan.

Du coup je commence à remonter vers le chantier présidentiel car l'heure du casse-croûte doit avoir sonné depuis longtemps. En arrivant sur place j'ouïs la sentence tant redoutée :"Ça boucle, putain de bordel de merde !". Effectivement, après la pose de quatre broches, Daniel a pu se glisser dans la lucarne et déboucher sur un puits qui, une fois encordé, l'a conduit dans le P20 principal. Le Président est un peu déçu, mais au final pas mécontent de son turbin dominical. Il déséquipe son petit bazar et nous décidons de passer à table (diable, il est plus de midi trente !). Pour atteindre le lieu des agapes, une plateforme située deux mètres en contrebas, j'utilise ma poignée Grivel toute neuve qui peut se transformer instantanément en descendeur. Je confirme : ça marche. Alors oui la corde était un peu grosse et bien humide, ce qui n'a pas facilité le coulissement, mais en pesant sur le système, on arrive a descendre cahin-caha. 

Nous pique-niquons rapidement en bavant sur les deux vestiges qui se sont barrés comme des rats, puis nous attaquons la remontée, votre serviteur en premier. Bien entendu, le fameux puits-chatière se passe les doigts dans le nez, avec de petits gestes et en visant le bon côté de l'étroiture. En débouchant à la surface, je bute avec étonnement sur l'ami Bernard, tout guilleret. "Ben, qu'est-ce que tu fiches là ?". "Ben, on vous a attendu" me renvoie l'intermittent charentais. Il apparait ainsi que les deux compères, loin de nous abandonner à notre triste sort, ont tué le temps en se livrant à des activités diverses et variées, plus ou moins contre nature, et au sujet desquelles le Président et moi-même n'avons rien voulu savoir. A propos de Daniel, il est 13h45 quand il s'extirpe du trou et si je compte bien, les deux vieux garnements ont eu près de trois heures et demie pour faire leurs cochoncetés...

Jérôme

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