Participants : Daniel, Francis, Jérôme
TPST : 6h30
Eté 2025 oblige, les effectifs actifs du GSV sont à peu près aussi bas que le niveau des cours d'eau du nord de la France. Notre ami Francis, lui, ne connaît pas les saisons et il a toujours en vue la pulvérisation de son record de descente établi à l'aven Yvan pour moins 88 mètres. C'est donc à sa demande que le Président a organisé une sortie à trois à l'aven du Petit Renard à Mobylette, sympathique cavité du plateau de Saint-Vallier remarquable par ses concrétions, son magnifique puits de 50 mètres, ses trois chatières pas piquées des hannetons et surtout une profondeur de 125 mètres que Francis aimerait bien toucher du doigt.
Il est 9h30 quand, en ce beau samedi de juin pas encore caniculaire, nous nous retrouvons garés à quelques encablures de l'aven. Et oui, avantage du Petit Renard, et non des moindres : il pointe à une poignée de mètres de la route. Du coup il est 10 heures quand nous nous enfilons dans le trou à la suite de Daniel qui a emporté, outre les deux kits de corde, son perforateur Bosch. Objectif : restaurer les deux fractionnements du P51 dont les amarrages ont carrément été laissés à l'abandon (qui a dit : les spéléos d'aujourd'hui se foutent complètement de surveiller l'intégrité des équipements de paroi ?). Méticuleux, le Président a prévu des fixes de 12 avec plaquettes reliées par une solide chaîne en inox. Si c'est pas fédéral, ça...
Du coup, ces menus travaux risquent de ralentir un chouïa l'équipement des puits mais c'est pour la bonne cause. Francis et moi en profitons pour baver sur tous les absents, sachant qu'ils ont bien sûr toujours tort. Seul Yannick échappe à notre fiel car il serait bien descendu avec nous déboucher une bonne bouteille. Malheureusement il lui manque encore un peu de pratique du passage de fractios et surtout une incertitude subsistait quant à l'adéquation entre son tour de taille et le gabarit des trois chatières...
Finalement, et malgré son grand âge, le Président fait sa petite affaire en moins de 30 minutes et nous pouvons descendre le P14 ainsi que le P51, admirant au passage des deux fractios de ce dernier la qualité de l'ouvrage présidentiel.
Francis s'extasie devant les volumes et le riche concrétionnement.
Il s'extasie un peu moins devant la première chatière vulviforme qui garde l'accès au P10 suivant. L'étroiture se passe à l'horizontale et de profil en s'étant délesté de la quincaillerie trop encombrante. Sur mes conseils éclairés et basés sur une grande expérience (il y a vingt ans j'y suis resté carrément coincé sous les quolibets de mes petits camarades, les enfoirés), Francis la franchit tel le suppositoire introduit pas le gros bout dans un anus accueillant.
Le P10 dévalé nous découvrons avec gourmandise la deuxième étroiture, cette fois verticale. La gravité aidant elle se passe sans problème (et toujours sans quincaillerie encombrante) mais le Président nous promet la misère à la remontée. Je rassure Francis : "Ne l'écoute pas, il est ronchon parce qu'il est midi passé et qu'on n'a toujours pas attaqué l'apéro". Et en guise de mise en bouche nous nous farcissons la dernière chatière verticale qui accède au dernier P20. Nous déjeunerons à la base de ce puits constituée d'une belle salle à moins 103 mètres, superbement concrétionnée.
Il est 12h40 quand le "plop" du bouchon de la bouteille de medoc cru bourgeois 2019 apportée par notre ami Francis résonne sous les draperies. Le pinard passe tout seul et ne survit pas à nos gosiers assoiffés.
Pour digérer, le Président nous amène au sous-sol du P20 et nous montre un méandre bien mouillé qui mène quelques mètres plus loin au siphon terminal marquant la cote moins 125. Nous nous dispensons volontiers de ce crapahut sans intérêt et Francis se contente avec satisfaction de son nouveau record de moins 118 mètres avec, cerise sur le pompon, la descente de son plus haut puits à ce jour (51 mètres). Daniel commence à s'exclamer "Ça s'arr...." quand il se rappelle que nous n'avons plus que de l'eau à boire.
La remontée s'effectue dans l'ordre "votre serviteur-Francis-Dada" (dans une partie à trois il en faut toujours un au milieu). Le Président ferme la marche pour déséquiper, je l'ouvre pour éventuellement assister celui du milieu dans les passages délicats. Je n'aurai finalement rien à faire car Francis s'affranchit les doigts dans le nez des étroitures et, enfin équipé de son bloqueur de pied chinois tout neuf, savoure sans modération le confort procuré par ce petit accessoire dans les ascensions. Tout juste si je l'entend appeler à l'aide depuis le premier fractio du P51 pour cause d'impossibilité d'ôter son crolle. Je le rassure depuis la tête de puits "pense à ton bloqueur de pied mon petit Francis : tu te hisses un petit coup et tu vas voir..." L'ayant entendu crier victoire je termine l'ascension du P14 avec mes deux kits et sors du trou vers 16h. C'est là que je constate avec étonnement que ma poignée est toujours accrochée à la vire d'entrée alors que je suis à deux mètres d'elle sans ressentir aucune traction côté longe : normal, le noeud de longe est défait, mousqueton et jumar etant restés sur la corde. Un frisson rétrospectif me parcours le bas du dos, mais un très court instant. L'incident a dû intervenir dans le ressaut d'entrée car je me souviens avoir retiré la poignée en sortie du P14 avec la longe bien accrochée. Ouf.
Francis pointe son museau cinq minutes plus tard, fatigué mais content. Dix minutes plus tard j'entends l'organe présidentiel : "Jerôme, viens me prendre les kits, j'en ai plein les roubignolles !" Et c'est un Daniel rouge comme un coquelicot qui s'extirpe du trou à 16h30. Plutôt rouge de colėre car il nous annonce avoir cassé sa pédale au départ d'un puits à force de pousser comme un âne pour hisser ses kits. Heureusement ce bricoleur de génie s'en est confectionnée une de secours avec une sangle et un mousqueton.
Lorsque je lui narre mon histoire de longe défaite il s'énerve encore un peu : "c'est normal tu as fait un noeud de merde, pour les longes faut un noeud de 8, ça se défait jamais !" Je proteste en lui rétorquant que ce n'est pas moi qui ai fait ces noeuds car j'en suis tout simplement incapable. "Alors trouve qui te les a bricolé et fais-lui un procès !" me lance-t-il avec un rictus diabolique digne d'un collabo zélé sous l'Occupation. Je me vois mal intenter un procès a mon ami Mathieu qui est mon fournisseur officiel de noeuds depuis plus de quinze ans ! Quand on vous dit que les absents ont toujours tort...
Jérôme
(avec les photos de Francis)
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